jeudi 17 mars 2022

Willem est Wivant !

Voici un dessin de presse de Thibaut Soulcié, qui était amusant lors de sa parution le 25 févrierThibaut Soulcié passe sur télérama, sur touitosse, et parfois même au 28 minutes d'Arte.


Amusant, ce dessin ne l'est pas resté très longtemps.

Celui-ci, daté du même jour, non plus.
En voici un autre, ci-dessous, qui sera relativement cocasse jusque entre les deux tours.

C'est le problème, avec les dessins de presse : ils périment aussi vite que l'actualité. Il faut du génie pour qu'ils s'inscrivent dans la durée. Qui se souvient de Jean-François Copé, sauf s'il le revoit dans une caricature de Willem ?

Willem est le seul survivant de la première génération d'auteurs de la bande décimée de Hara Kiri / Charlie Hebdo "canal historique". 
Octogénaire, il vient tout juste de prendre sa retraite de Charlie et de Libération.
Il va nous manquer. Je ne comprenais pas grand chose à ses bédés des années 70, mais Il y a dans ses 40 ans de dessin de presse une adéquation parfaite entre le fond et la forme, et une perfection glaçante dans l'expression artistique de l'ignominie mortifère chez l'humain politique.
Ses dessins paraissent régulièrement en recueils aux requins marteaux.








mardi 15 mars 2022

La gloire de Hara Kiri (2013)

Il est dommage que les scanneurs et uploadeurs qui ont retrouvé des vieux Hara Kiri dans la cave de l'oncle Georges
(1)(voir article précédent) n'aient pas mis la main sur un trésor de guerre d'avant-guerre plus conséquent portant sur la première décennie du journal, avant l'auto-radicalisation de l'équipe, suite aux nombreux procès intentés par les marques commerciales pour diffamation. Les fausses publicités naissantes de Gébé, les dessins de Fred ou de Topor faisaient de ce Hara Kiri première manière une revue de choix pour les esprits curieux.
On retrouvera de belles pièces de cette première période du journal dans La gloire de Hara Kiri, édité chez Glénat.

https://www.glenat.com/humour-glenat-bd/la-gloire-de-hara-kiri-9782723498432

les blagues d'Eros et Thanatos

Les couvertures de Fred


Campagne d'aversion du tabac, par Topor. What else ?
Gébé, le surréaliste.

L'oncle Georges n'est tellement pas raciste
qu'il lisait Hara Kiri et Charlie Hebdo.
(1) l'oncle Georges a rejoint les partisans ukrainiens après avoir enfourné dans sa 405
- l'extension TomTom « Pays de l’Est » en promo cette semaine à 141,99€(indispensable pour trouver Kiyv après avoir quitté la Pologne par la RD 208)
- le vieux fusil légué par Robert Enrico qu'il avait planqué au cellier pour pas que les gosses le trouvent
- la boite de cartouches cachée derrière le meuble à chaussures fait à la main
- un thermos de café
- la doudoune des sports d'hiver
- un plein de gasoil 
et en avant, comme avant, avec AC/DC dans l'autoradio. 
Respect, au moins pour l'idée de donner du sens à sa life en l'offrant à des nécessiteux, en attendant la prévisible désillusion, quand il constatera qu'il n'a pas l'endurance des Ukrainiens à vivre sans eau, sans électricité, sans vivres, avec juste une Kalash enrayée et les chars qui se rapprochent de l'immeuble éventré où il s'est abrité pour refaire son bandage, tandis qu'il entend le pouls monstrueux de la guerre battre dans le ciel écarlate, par vent favorable, comme dans une nouvelle d’Edgar Poe.
Pour ma part, j'essaye d'être à la hauteur, émotionnellement, et de ne pas glisser vers mes postures habituelles d’évitement. Si on ne va pas combattre à leur côté, on leur doit au moins ça, aux Ukrainien.n.e.s.
Comme le dit Serge Halimi dans le Monde diplomatique, « C'est très difficile de résister en ce moment au courant de la propagande quand, en Europe comme aux États-Unis, l'information semble n'avoir plus qu'un objectif : non pas informer, mais mobiliser le plus possible l’opinion publique. »
Et où sont Les Nouveaux Satiristes, les enfants naturels et légitimes de Hara Kiri, qui pourraient rire de la Guerre aux Portes de l'Europe comme ils riaient avant-hier de la famine au Biafra ou de la Guerre des Six Jours ?
Les Nouveaux Satiristes, ben ils ont commencé à imaginer une nouvelle série de canulars téléphoniques, dans la lignée de ceux de Francis Blanche ou de Jean-Yves Lafesse, mais pour l'instant ça ne les fait pas rire. Et ils en ont un peu plein le cul de vivre des moments historiques, comme disait l'autre. Ce qui les fait ricaner jaune, par contre, c'est la blague de Houellebecq, qui a réglé son compte à l’humour il y a bien des lustres :
"On dit souvent que les Anglais ont développé des qualités de sang froid et de réserve, une manière aussi d'envisager les évènements de la vie - y compris les plus tragiques- avec humour. C'est assez vrai; c'est complètement idiot de leur part. L'humour ne sauve pas; l'humour ne sert en définitive à peu près à rien. On peut envisager les évènements de la vie avec humour pendant des années, dans certains cas on peut adopter une attitude humoristique pratiquement jusqu'à la fin; mais en définitive la vie vous brise le cœur. Quelles que soient les qualités de courage, de sang froid et d'humour qu'on a pu développer tout au long de sa vie, on finit toujours par avoir le cœur brisé. Alors, on arrête de rire. Au bout du compte il n'y a plus que la solitude, le froid et le silence. Au bout du compte, il n'y a plus que la mort."
Sacré Michou. Dans le temps, aux Inrockuptibles y disaient qu'il fallait déstaliniser le Houellebecquistan. La formule était drôle, mais je n'avais rien compris à l'article. Tant qu'ils n'envisagent pas de dénazifier l'Ukraine, tout ne peut qu'aller mieux.

Les Nouveaux Satiristes font des gifs de boomers,
mais ça ne les console ni des gifs, ni des boomers.

Un nouveau satiriste essayant de faire croire qu'il a un compte twitter
et qu'il sait s'en servir.





Des nouveaux satiristes essayant de faire le buzz sur touitosse. En réunissant toutes les bonnes volontés du mauvais esprit disponibles, on pourrait peut-être refonder Hara Kiri avant que les Russes arrivent. Mais la fête serait triste, car elle est finie depuis un moment.

dimanche 13 mars 2022

20 numéros de Hara-Kiri (1960/1972)

le désir du nirvana, c'est le samsara
"La violence, rétorque Hardin, est le dernier refuge de l'incompétence. Mais je n'ai certainement pas l'intention de déployer un tapis sous les pas des envahisseurs ni de leur cirer les bottes."

Isaac Asimov, Fondation (1966)
Vladimir P. n'a jamais lu son compatriote Isaac A., ou alors il a sauté des pages. Attendu que l'espèce humaine manifeste des velléités enthousiastes pour s'autosuicider comme ça lui arrive quand des autocrates affaiblis et surarmés se voient possédés par le démon de la misanthropie à un niveau galactique, voici vingt numéros du journal Hara-Kiri, collectés autour de l'âge d'or du journal.  
On pourra toujours les relire sous les gravats, en laissant parfois échapper un ricanement blessé, tandis que papigeek pédalera comme Edward G. Robinson dans Soleil vert pour assurer l'alimentation électrique de l'ordinateur à pédales.

Reiser, 1970

les jeux de con du Professeur Choron n'ont pas pris une ride.

Les BD de Reiser ou de Gébé ont mieux vieilli que les "réclames" à la sauce bête et méchante, censées dénoncer et combattre les abus et l'obscénité de la publicité à vocation commerçante qui commence alors à saturer le quotidien, vers la fin des trente glorieuses, à l'orée des trente merdeuses. Les romans-photos transgressifs en matière de sexualité et de socialité ont eux aussi beaucoup perdu de leur pouvoir blasphématoire pour rejoindre le royaume du kitsch, où ils resplendiront dans les siècles des siècles. 
Du rédactionnel à profusion, on était en plein chevauchement de la culture de l'écrit et de celle de l'image, des textes souvent assez poétiques de Cavanna, Gébé, Delfeil de Ton, et toute la bande de gôchistes post-situ et pré-punk qui constituait l'équipe d'Hara-Kiri / Charlie Hebdo dans les années 70.


la pochette promotionnelle du florilège, encore sous son blister translucide :
aussi belle qu'un supplément illustré de Warsenator-dimanche
(l'éditorialiste de légende qui fait la grève des mots pour protester contre la guerre)





le logo du journal, avec une couche alpha habilement glissée dans le .png


samedi 12 mars 2022

Steve Roach Live - Phoenix Synth Fest (2022)

On y croit. On y va. Sur Youtube, c'est presque comme si on y était. Presque.

Deux heures trente d'un concert récent de Steve Roach qui ne donnent pas du tout envie d'envahir la Pologne. C'est toujours ça de pris. 
La piste son du Youtube a été crackée en mp3 à 128 kbit/s devant huissier, avec le célèbre logiciel 4K YouTube to MP3 qui je l'espère n'a pas été développé par les Russes.
Steve avait l'air assez content de rejouer devant du public plutôt que dans le placard à balais sous l'escalier, en plus ça fait des vacances à sa femme, sans doute une sortie prochaine sur Bandcamp, à surveiller, parce que dans le genre, c'est assez réussi. 
Bien que ça ressemble beaucoup à ses derniers albums studio, parce que je n'entends pas bien sur celui-ci ce qui différencie ses prestations "live" de ses recherches quantiques à la cave, pardon, dans la Timeroom (le home studio installé chez lui).
A noter que si le concert est identifié 2/11/22 sur l'affiche, c'est pas parce qu'il va avoir lieu dans le futur, en un encore hypothétique mois de novembre 2022, date à laquelle nous ne savons pas à l'heure où nous mettons sous presse si Christopher Nolan sera en capacité de nous le renvoyer dans le passé à l'aide de son célèbre logiciel réversible Tenet®, mais parce que les ricains écrivent les jours et les mois à l'envers. C'est vraiment pas des gens comme nous, comme on dit à l'OTAN (en emporte le vent).

jeudi 10 mars 2022

Le petit Steve Roach illustré : Une année 2021

Into the Majestic (2021) 

Il y a des disques de Steve Roach qui ronflent et grondent comme un Alligator 427 en approche de Kyiv. Celui-ci, non. C'est même un disque de musique planante comme on n'en attendait plus de la part du recuit de l'Arizona : deux longues plages étirées vers l'infini, et sans doute au-delà, dorées au soleil intérieur de la bienveillance en harmonies majeures et cascades tintinnabulantes, majestueuses comme un Pape à Noël. The Spiral Heart est une rêverie chaleureuse et ouatée, parcourue de ponctuations rythmiques sobres et élégantes. Et pourquoi Steve a-t-il attendu tant d'années pour redécouvrir les vertus d'une stratosphère expurgée des gaz à effet de serre dont il abusa jadis ?
Into the Majestic déroule ses volutes de séquenceurs placides, lumineux, outrageusement lénifiants, qui paraîtront confits dans la sérénité et pour tout dire un peu plan-plan aux aigris crispés sur leurs certitudes que tout fout le camp, sauf l'impermanence et les accords de Minsk. Tant pis pour eux. Les autres seront ravis de faire du surf à la surface de ce lac de montagne miroitant. Le morceau a été créé en concert depuis la Timeroom, et a été diffusé en direct le 24 octobre 2020; le stream en est encore visible ici :

(4/5)
https://steveroach.bandcamp.com/album/into-the-majestic

Temple of the Melting Dawn
 (2021) 
en collaboration avec Serena Gabriel

Steve et Serena visitent le Temple de l'Aube fondue, main dans la main en grignotant du gruyère râpé. Il a amené ses synthés, elle a pensé à apporter ses flûtes, son harmonium de poche, tout ce qu'il faut pour faire une petite session live; sans oublier le picnic, car les femmes savent faire et même penser à plusieurs choses à la fois, contrairement aux mecs qui n'ont qu'une vieille pétoire à un coup. Hormis le morceau In Another Time, plein de charmes anciens et de secrets ouatés et luminescents, le reste se veut une invitation à la contemplation, mais ne m'évoque rien, malgré la présence d'instruments traditionnels. C'est spectral et diaphane, mais ça manque de corps, de narration, d'évènements sonores plus consistants que la trace des chips froissés sur la nappe de l'ambient. Quand Eivind Aarset et Jan Bang partent explorer les territoires inconnus qu'ils génèrent autour d'eux en faisant semblant de n'avoir jamais croisé Jon Hassell, on est toujours étonnés de se trouver là, en cet endroit. Steve et Serena ne font que susciter une somnolence coupable.



As It Is (2021)

Un album pour une fois varié dans sa palette de coloris : la moitié des pièces exsudent des climats vraiment travaillés et originaux (What Falls Away, Threshold Meditation, Emerging) tandis que l'autre moitié du bol contient de la soupe en sachet délayée à l'eau froide, avec les ingrédients habituels, sauf l'ingrédient secret, cruellement absent.

(3/5)



Live at SoundQuest Fest (2021)

Interminable pensum de cascades de friselis d'arpèges harmoniques texturés et programmatiques, sauf pour la dernière piste, sauvée de la langueur monotone par les boites à rythme tribales, comme on le voit sur la vidéo. C'est pas parce que c'est enregistré dans les conditions du direct que ça doit être aussi pénible qu'un disque studio. Evidemment, arrive toujours le moment où Steve lève le nez de ses machines et s'aperçoit que tous les spectateurs sont en train de quitter la salle, il tente alors de sortir de son trouble du spectre autistique en balançant quelques percussions synthétiques imitant à s'y méprendre les tambours d'un vieux sorcier de l'ayahuesca. Aah, si Peter Gabriel n'avait pas inventé par inadvertance le tribal ambient en faisant revenir à feu doux Peter Gabriel 4: Security dans sa cuisine numérique, le dark ambient n'aurait peut-être jamais vu le jour...

Peter Gabriel enfile son masque de chaman
pour faire une blague à son vieux chat cardiaque
Dans l'interview avec Alan Freeman fébrilement retranscrite dans le fanzine White Shadow (#3, pp12), Gabriel nous dit en substance : "J'ai retrouvé une conscience rythmique. Et l'écriture - en particulier avec l'invention de ces boîtes à rythmes - est fantastique. Vous pouvez stocker dans leurs mémoires des rythmes qui vous intéressent et vous excitent. Et puis le groove continuera sans vous , et le groove sera exactement ce que vous voulez qu'il soit, plutôt que ce qu'un batteur pense être approprié pour ce que vous faites."
Ici, dans Live at SoundQuest Fest (2021), à ne surtout pas confondre avec l'excellentissime Live at SoundQuest Fest (2011) il faut attendre le 4ème et dernier mouvement pour que Steve se rappelle de cette interview et retrouve la marche avant, comme avant. 
Ah c'est sûr que si tout le concert avait été du même tonneau, on aurait moins mégoté sur l'entouziasme. Du coup on va visionner la vidéo du non-évènement
et là, on capte l'aspect physique de la prestation (à partir de la cinquantième minute) vécue dans le champ expérimental et intersectionnel
et on fait un ajout à la Rétrospective qui fut la meilleure anthologie de Steve réalisée après l'écoute sous contrôle d'huissier des 257 albums de sa discographie récente

(2/5)

Beyond Earth & Sky (2021)
en collaboration avec Michael Stearns

Michael Stearns est surtout connu pour ses musiques de films documentaires méditatifs et anxiogènes, sauf pour les effondrologues (Baraka, Samsara) films qui s'inscrivent dans la lignée de la trilogie Koyaanisqatsi produite dans les années 80 par Francis Ford Coppola et qui dénonçait, je cite, "
les prémisses de notre société ultra-libérale, où tout est marchandise, même l’homme, tiraillé entre son désir de possession et l’asservissement induit par celui-ci." 

http://www.slate.fr/story/69837/samasar-un-autre-documentaire-est-possible



les musiques de Michael Stearns
dans les films de Ron Fricke,
c'est quand même quelque chose,
même sans la 8K Digital HD.
Surprise : en collaborant pour la première fois depuis 1995 avec Steve Roach, 
Michael Stearns lui apporte une syntaxe plus articulée, un espace plus vaste, et lui offre un vrai tremplin pour éviter l'appauvrissement cognitif et relationnel qui le guette chaque fois que sa femme oublie de planquer les clés du studio d'enregistrement et qu'il passe des journées entières à y faire ses petites expériences hébéphrènes : simuler encore et encore des phénomènes biologiques ou météorologiques en secouant quelques molécules dans une éprouvette, dans son labo creusé à flanc de montagne sous la salle à manger, puis réduire son interaction au minimum et se contenter d'observer ce qui se passe - c'est cela qui est donné à voir dans les vidéos de ses concerts : il se déplace précautionneusement entre des murailles de synthétiseurs analogiques, titillant un potentiomètre ici, effleurant un curseur là, attentif à ne pas interférer avec l'expérience en cours, comme si ses séquenceurs étaient bourrés de chats de Schrödinger. Ici, il y a des intentions, un tempo, des harmonies, de l'amplitude, tout ce qui fait défaut par défaut à son usine de galettes ambientes. Comme le résume un auditeur attentif : Just beautiful soundscapes that capture nature in all its glory.

(5/5)


Epilogue : je découvre que ♫ Piero Scaruffi's Music Database dispose de plein d'entrées sur Steve Roach. Je vais pouvoir comparer nos notes, pour voir s'il classe lui aussi Steve Roach à la rubrique des cavaliers de l'Apocalypse, au même titre que la Conquête, la Guerre, la Famine, la Mort, l'Epidémie, et la compile de John Warsen.

mardi 8 mars 2022

[Repost] Metal Hurlant #6 à 10 (1976)

Une erreur s'est glissée dans l'illustration :
c'est la couverture de Metal #15
mer. 26 août

http://www.megaupload.com/?d=IQDTGBEG
(attention, ne clique pas, ça fait longtemps que ce lien est obsolète, tu risques d'être redirigé vers Russia Today, toujours accessible par ordi alors qu'il ne l'est plus sur smartphone. C'est ça, la dictature numérique. Joe Staline reviendrait, il ne serait pas content.)



lun. 7 mars

Souvenez-vous. C'était hier. En 1976, Métal Hurlant est interdit aux mineurs, et en même temps devient mensuel. 
Dans un numéro de Métal hurlant, une drôle de signature est apparue. Celle d’un certain Joe Staline. Les lecteurs se sont interrogés. Qui est ce mystérieux Joe Staline ? Philippe Manœuvre ? Jean-Pierre Dionnet ? Un autre journaliste de Métal ? Un pseudonyme collectif que chacun peut emprunter à sa guise ? Nous n’avons jamais révélé son identité. Joe Staline est resté un inconnu célèbre, un mystère vivant, un éternel point d’interrogation. Je crois que l’heure est venue de lever le voile. Joe Staline, c’était moi. Enfin, la plupart du temps, à hauteur de 80 %. Dans 10 % des cas, c’était Manœuvre, et les 10 % restants se partageaient entre d’autres rédacteurs ou dessinateurs, comme Luc Cornillon. L’idée d’utiliser ce pseudo m’est venue en feuilletant un livre intitulé Joseph Staline, ma vie secrète, écrit par Alain Paucard, l’un des collaborateurs de Métal. Je l’avais déniché dans la librairie de celui-ci, un authentique repaire de gauchistes. Sur Internet, quelqu’un que je ne connais pas se fait passer pour ce bon vieux Joe en signant « Jo Staline », sans « e ». Méfiez-vous des imitations. C’est un faux, un fake, un imposteur, un usurpateur. Il n’y a qu’un seul et unique Joe Staline.
Joe Staline était un autre moi. C’était mon garde-fou, celui qui me ramenait dans le droit chemin quand je m’égarais. C’était mon ange gardien, ou plutôt mon petit diablotin. Comme dans les dessins animés de Tex Avery, où l’on voit le loup entouré de deux démons qui lui indiquent la marche à suivre, et le pauvre loup ne sait pas quoi faire, on le sent perdu, tiraillé entre deux injonctions contradictoires. Joe Staline écrivait des choses que je ne pouvais pas me permettre d’écrire. Il était sévère avec moi. Il critiquait mes choix éditoriaux et mes lubies du moment. À Métal, j’avais choisi de ne pas avoir d’idéologie précise. Chacun était libre de dire, d’écrire et de dessiner ce qu’il pensait afin d’exprimer sa vision du monde. Je ne censurais personne, par conviction et par intérêt, car je tenais à ce que le journal accueille toutes les expressions. Il n’y avait que deux sujets tabous : l’antisémitisme et la pédophilie. Pour le reste, je laissais faire, même si je n’étais pas toujours d’accord. Joe Staline pouvait être réactionnaire. Quand on lui en faisait le reproche, il répondait par l’une de ses maximes favorites, selon laquelle « les avions à réaction avancent plus vite que les avions à hélices ». Il était beaucoup plus intelligent que moi. Il me servait à défendre un disque ou un livre que je ne pouvais pas défendre sous mon nom, car je me serais trouvé en contradiction avec un autre de mes articles. Il pouvait dire n’importe quoi, professer les idées les plus subtiles comme les pires stupidités. Il était l’enfant naturel de Léon Bloy et de Jules Barbey d’Aurevilly. Son esprit volait bien plus haut que le mien.
Mes moires, un pont sur les étoiles by Jean-Pierre Dionnet




La Russie est redevenue l'URSS, c'est normal que Métal reparaisse.
Reviens, Joe, ils sont devenus fous. 

lundi 7 mars 2022

[Repost] Metal Hurlant #1 à 5 (1974/75)

Acier couinant, le vrai. Le seul.
dim. 23 août 2009

...parce que l'été est la période idéale pour lire la Machine à rêver,  le livre consacré à ce perturbé précepteur de mon adolescence... et parce que j'ai trouvé des scans des premiers numéros. 
http://www.megaupload.com/?d=XGVWK5YG
(attention, ne clique pas, ça fait longtemps que ce lien est obsolète)

dim. 6 mars 2022

- parce qu'on n'a rien fait de mieux depuis l'invention de Métal Hurlant,
- parce que les tentatives de réinvention successives se sont avérées aussi décevantes qu'une bonne décharge au défibrillateur sur une personne en état de mort cérébrale
- parce que l'équipe qui a repris le magazine l'an dernier s'est faite virer au bout du premier numéro du reboot
et que le numéro 2 de la nouvelle formule est un "digest" de la première mouture sous la houlette de Jerry Frissen.

L'ancien numéro 2. Le seul, le vrai.
Quand j'étais petit, le numéro 2 d'Acier couinant fut très vite épuisé, et introuvable, et je pensais devenir riche en entrant en possession de la reliure des numéros un à quatre, après plusieurs années passées à le rechercher, aujourd'hui les copies numériques ont ruiné le marché et je suis aussi pauvre qu'un oligarque russe, mais je peux quarante-cinq ans plus tard l'exhiber fièrement à tous les passants, bien qu les scans ne soient pas les miens.


N'achetez pas à un revendeur à la sauvette le "nouveau" Métal Hurlant, c'est une resucée du vieux.
Préférez l'original, au goût Métal !




Le nouveau numéro 2.
Pas vraiment une contrefaçon.
Plutôt un fac-similé.


samedi 5 mars 2022

Francis Lalanne - Le Champignon nucléaire (1981)

Il n’y a pas plus anxiogène, même pour des Princes de l’inquiétude, que de regarder ces pauvres Ukrainiens se faire massacrer. Même en leur envoyant des sous par le truchement des ONG pour financer l'achat (à prix discount dans les parapharmacies qui auraient pu rester ouvertes après le passage des bombardiers à basse altitude) de sparadrap et de mercurochrome, suite aux échardes récoltées dans le pouce gauche et autres petits bobos de la vie auxquels on s'expose après avoir pris sa maison sur la tête et un obus dans sa blanquette.
Enfin, si, ce qui se profile d'encore plus anxiogène, c’est le chantage au nucléaire - destruction des infrastructures civiles au risque calculé d’un Tchernobyl 2 encore mieux que le 1, « dissuasion » du nucléaire militaire par la menace de l’utiliser et la crainte de l’embrasement généralisé conséquent. Qui a parlé « d’équilibre de la terreur » ? Pour l'instant, elle est unilatérale.
En 2010, Poutine disait qu’il irait buter les terroristes tchétchènes jusque dans les chiottes, on découvre aujourd’hui que le terroriste, c’est celui qui le dit qui y est. 
Et ça ne date pas d'hier, comme le documntaire " Poutine - Le retour de l'ours dans la danse" le montre.


ça m’a rafraichi sur Vladimir, mais ça ne m’a pas remonté le moral.
Ils font une journée spéciale guerre en Ukraine aujourd’hui à partir de 13h15, à éviter si votre tension excède déjà 14/9. Une chance supplémentaire de mourir surinformé pour les autres. Je vais aller au marché acheter des huitres, tiens. Tant qu’il en reste.
Pour l'instant, pas beaucoup de volontaires pour aller nettoyer les cagoinces à Moscou.
Et si on parachutait Francis Lalanne et son champignon nucléaire sur le Kremlin, après l'avoir fait monter à bord d'un Alligator 427 sous un fallacieux prétexte ? 
Les conspirationnistes sont fragiles, crédules, et prompts à se laisser embobiner. Francis, pardon d'avance, dieu sait que je t'ai aimé quand on était jeunes toi et moi, mais là tu trouverais une utilité sociale kolossale, et la notion de chanteur engagé prendrait tout son sens. Et on ferait d'une pierre deux coups. 


Sinon, j'ai un nouveau copain croisé à vélo cette semaine qui serait d'accord pour y aller, l'ennui c'est qu'il est en 2D sur une cabane du bord de Sèvre.


Ce qui serait pire, bien sûr, c'est que 
Dame Fortune nous ait fait naitre Ukrainiens, auquel cas nous ne serions point ici à pérorer, mais à tenter de survivre sous les bombes, et expérimenter ce postulat qu'on m'a rapporté tantôt : celui qui n'a pas vécu la guerre ignore tout des vertus de la prière.
(vertus auxquelles on a bien sûr consacré des bibliothèques entières)

jeudi 3 mars 2022

Vladimir P.'s House Music_Hidden Tracks (2022)

Chacun réagit à l'agression de l'Ukraine à la hauteur de ses moyens. Puisque L’OTAN va parachuter 200 000 promesses de soutien, pour ma part j'ajoute 3 titres à mon florilège Vladimir P.'s House Music
http://jesuisunetombe.blogspot.com/2022/02/vladimir-ps-house-music-2022.html


Après avoir envoyé hier une poignée de roubles à la Croix Rouge, malgré la modestie de mes revenus, ces titres se sont imposés à moi, et quasi-bousculés dans l'antichambre de ma conscience pour intégrer la compilation de soutien sortie samedi dernier.

- "Kalashnikov" par Goran Bregović, issu de la bande-son de Underground, le film de Kusturica qui relate le parcours de résistants clandestins enfermés dans une cave, depuis la Seconde Guerre mondiale jusqu'aux années 1990. A partir du destin croisé de deux amis, Marko et Blacky, depuis la résistance contre les nazis jusqu’aux milices serbes de Mladic en passant par les sommets de l’appareil d’Etat titiste, Underground trace une parabole sur l’histoire de la Yougoslavie de 1941 à 1991, un tourbillon allégorique qui sécrète de multiples questions, quelques réponses et beaucoup de confusion. 
Qu’est-ce que cela fait d’avoir grandi dans un pays qui n’existe plus ? Que faire de son encombrant fardeau de nostalgie ? Qu’est-ce que l’Histoire, comment s’écrit-elle, quels sont ses rapports avec l’idéologie ? Dans le couple Histoire/Idéologie, comment le cinéma et les images tiennent-ils la chandelle ? Comment les résistants d’hier se transforment-ils en salauds d’aujourd’hui et vice versa ?
https://www.lesinrocks.com/cinema/underground-2-99341-25-10-1995/
La polémique "Underground" avec l'indispensable BHL qui n'avait même pas vu le film avant de hurler "à l'assassin! "
http://www.kustu.com/w2/fr:polemique#le ... henri_levy
Toutes les musiques écrites par Goran Bregović pour les films de Kusturica sont magnifiques. On a surtout entendu celles de Arizona Dream, mais il faudra revenir sur les autres, ainsi que sur sa carrière post-cinéma.

- "Chérie c'est la guerre" par Sanseverino : on dirait qu'il vient de voir le Underground de Kusturica et qu'il en fait un palimpseste chanté :

c'était sur cet album, oui madame.
Des punks à chiens en limousine traversent la campagne de Serbie
De vieux dirigeants yougoslaves leur jettent des hosties
Ils ont le visage de Tito et le corps de Françoise Sagan
Mais ils ressemblent à s'y méprendre à Michel Blanc
Un vieil empereur en porte-jarretelles, la fiole de poppers à la main
Parle à sa cour des privilèges et leur dit "C'est pour demain !"
Et puis là, c'est la déferlante. Des vagues de haine xénophobe
Commencent à dévaster l'Europe et puis après, c'est tout le globe
Chérie, c'est la guerre !

C'est rare de voir Sanseverino partir sur une inspiration surréaliste, souvent ça tourne à vide, et je suis le premier à le déplorer. Là, il y a un petit côté Garcia Marquez, il faut en profiter, ça durera pas aussi longtemps que la guerre les impôts.

- "Alligators 427"  par Hubert-Félix Thiéfaine : les joyeux débuts du prophète auto-proclamé de l'Apocalypse Permanente et Inoxydable, qui ne fut jamais meilleur que dans cette funèbre et effroyable ritournelle propre à enterrer tous les effondrologues sous les gravats passés, présents et futurs. 

Ils arrivent, et je n'ai rien à me mettre.

Quelqu'un a prétendu sur Internet que Alligator 427 était le nom de code de l’armée américaine pour désigner les bombes nucléaires utilisées au Japon en 1945, mais je ne retrouve rien sur ce fait pseudo-historique, surtout depuis que Russia Today n'est plus accessible en ligne. Je pense qu'il a confondu avec "Arigato 427", qui était l'indicatif qu'il fallait composer sur les vieux téléphone à cadran dans la sous-préfecture de Kyoto pour joindre l'opératrice afin qu'elle vous passe le 22 à Asnières, et ce n'est pas très grave. En faisant des recherches sur cette chanson, j'apprends que c'est la terreur du cancer qui l'a inspirée à Hubert-Félix, cancer qui s'est révélé ensuite n'être qu'une carence en vitamines liée à la malnutrition, parce que le début de sa carrière fut peu nourrissant.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Alligators_427

Heureusement que  « Les plus désespérés sont les chants les plus beaux. Et j’en sais d’immortels qui sont de purs sanglots », comme nous le disait Alfred de Musset en sortant du Palace, et Hubert Félix ne tarda pas à accéder au rang de Prince de l'Inquiétude et à succomber aux charmes d'une alimentation riche en protéines grâce au relatif succès de ses requiems pour flippés.



mercredi 2 mars 2022

Guerre en Ukraine : comment apporter de l’aide aux civils ?

Hamburger Film Sandwich (1977)

Les blindés se rapprochent de Kiev. 
La destruction de l'Ukraine et de ses habitants s'amplifie. 
Que faire, à part éteindre la télé et lire Russia Today avec le doux frisson de l'interdit ?
Le journal Le Monde suggère d'aider les populations civiles, dans un article que je n'ai pas besoin de pirater, car il est gratuit.
https://www.lemonde.fr/international/article/2022/02/28/guerre-en-ukraine-comment-apporter-de-l-aide-aux-civils_6115618_3210.html
J'envoie tout de suite 100 balles à la Croix Rouge, parce qu'on n'a qu'une vie, sauf quand on la perd.
Un des commentateurs ajoute même :
Et si vous voulez aider les militaires ukrainiens à rester en vie (ex : jumelles nocturnes) , il y a la fondation ukrainienne réputée très fiable Come Back Alive
comebackalive.in.ua
Si ça peut éviter quelques mésaventures...
Et pour une fois qu'un article du Monde n'est pas trollé par les pro-Russes, ça se fête ! 
Vodka pour tout le monde ! 
Ah flûte, avec le blocus économique des Russes,  y'en a déjà plus.
Et comment réagiraient les pingouins de Xavier Gorce ?
ah mais putain de Poutine, je prends presque autant de Cortisone que lui et Pompidou réunis, mais en quelques clics je les retrouve, mes pingouinous !