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jeudi 3 novembre 2022

Jak Belghit - Concerto pour guitare et looper (2022)

Un jour qu'il était encore enfant, Jak est abandonné en forêt par ses parents, dont l'élevage de lapins angoras vient d'être décimé par la myxomatose, les contraignant à une sobriété contrainte, même si ça fait deux fois "contrainte" dans la même phrase. Sans haricots magiques pour grimper le long après qu'ils auraient poussé, ni petits cailloux blancs pour retrouver son chemin après l'avoir perdu, Jak est alors recueilli puis élevé par une horde de guitares sauvages, qui passait par là à l'heure où les grands fauves vont boire au marigot, tandis que les petits slurpent des flaques d'eau croupie. La horde le gave de biberons fourrés aux médiators, et le soir, pour l'endormir, les guitares le bercent de mélodies dont il se souviendra adulte, en mémorisant la position des doigts sur le manche.
Sans transition ni explication, on le retrouve brusquement dans la rue, où il élève un bébé looper, et joue pour gagner leur vie à tous deux les mélodies dont il se rappelle de quand il vivait nu au milieu des fauves musicaux. Dans la rue, si l'on veut survivre, on ne peut pas tricher, ni régner à coups de 49.3, ni faire du barouf à base de riffs empruntés en espérant que les passants nous lapident de piécettes, il faut simplement être bon, pour provoquer l'attroupement et déclencher le réflexe donateur

un looper beaucoup moins musical
que celui de Jak
Parce que qu'est-ce que ça bouffe comme piles, un bébé looper. Comme les fils de l'homme, le bébé looper se nourrit des phrases qu'on lui dicte, mais au lieu de ponctuer sa réponse de "apopo" et "800 pieds" comme les bébés dans l'encyclopédie de Goossens, le looper répète imperturbablement tout ce qu'on lui a confié, en mimant l'humanité de son créateur avec un semblant d'intelligence qui se voudrait artificielle mais qui n'est que mécanique. C'est pourquoi il ne faut pas lui donner n'importe quoi à répéter, comme au bébé normal. Ajoutons que dans ce disque-ci, le bébé looper est noori avec tant de musicalité et de délicatesse, qu'on jurerait parfois entendre Jak jouer plutôt que son bébé (qui ne braille jamais, contrairement aux bébés humains.)

 
Echaudé par les frippertronics, on croit que les boucles de guitare nous entraineront vers le circulaire et le répétitif, qu'elles seront à l'équilibre en n'importe quel point du cercle qu'elles produisent, ce qui n'est possible que si l'on était en même temps plein de foi en la science mais nul en géométrie à l'école, et on craint que ça sera quand même un peu ennuyant à écouter. Pourtant, je n'ai perçu nulle répétition, juste l'âme d'un musicien explorant sans crainte ni ombre au cœur le multivers des mélodies possibles, avec des phrases qui apparaissent et disparaissent, comme au cours d'une méditation, en toute simplicité, dans une nudité désaturée, désarmante et splendide. Puissè-je être un jour aussi rêveur, vaporeux mais précis, peu réverbéré mais comme en une cathédrale, dans ma pratique. Je ne vais pas vous chanter Ramona jusqu'à la Saint-Glinglin : ces instrumentaux enregistrés vivants dans la rue sont une démonstration discrète de puissance et de sensibilité. 
On l'aura compris, si un seul d'entre vous achète l'album, j'aurai gagné ma journée.

https://jakbelghit.bandcamp.com/album/concerto-pour-guitare-et-looper-3

samedi 25 janvier 2020

Lovecraft Facts (7) : Toshio Saeki

Pendant les journées de plomb qui m'ont vu rédiger laborieusement  mon pensum en forme de testament spirituel sur The Lighthouse, l'illustrateur japonais Toshio Saeki se mourait. Il aurait pu dessiner haut la main le storyboard des scènes oniriques du film avec la sirène, n'eut été le tabou nippon frappant les organes génitaux d'interdiction de représentation.
En fait, Toshio Saeki nous quitta le 21 novembre 2019 à l'âge de 74 ans, mais l'annonce de son décès par sa famille n'eut lieu que le 14 janvier 2020. Une preuve supplémentaire, s'il en était encore besoin, de la fourberie asiatique.
Donc techniquement il était déjà entré puis ressorti des bardös, dont la visite ne dure que 49 jours maximum, mais ses proches avaient dissimulé son trépas, pour des raisons sans doute patrimoniales, car il doit être compliqué de revendiquer son héritage. Qui pourrait reprendre pour le faire fructifier son petit bazar de l'épouvante Ero-Guro (terme japonais contractant les mots érotisme et grotesque), un genre artistique qui semble avoir été inventé pour lui tout seul et qui voit surgir des scolopendres en plein coït, des décapitations pendant les préliminaires sexuels, des asticots dans les sushis et tout un bestiaire du malaise vagal venir s'épanouir avec la suffocante familiarité des rêves qui tournent mal ?

Attention, n'essaye pas de refaire ça chez toi !
On ne peut pas du tout le rattacher à la tradition Wasp de l'épouvante à la Lovecraft, car celui-ci faisait ceinture l'impasse sur la sexualité, mais dès qu'il était question de mêler macabre, grotesque, sexe et violence, le tout avec une ligne claire digne des plus grands de la franco-belgitude, Saeki envoyait du pâté.
Qui mieux que lui pouvait faire enfourcher le vélo sans selle de Thanatos à la gracile Eros ?
Je vous aurais bien proposé une visite du monastère, mais il y eut en l'an de grâce 2018 une Grande Purge du contenu adulte sur Tumblr, visant à débarrasser la plateforme communautaire de micro-blogging de la racaille pédopornographique et nationaliste, purge sans doute légitime dans ses aspirations bien que fomentée par des rejetons puritains et bâtards de Lovecraft auprès de laquelle celles de Staline ne furent qu'aimables séjours de cure thermale à Lamalou-les-Bains. Les  algorithmes des logiciels de reconnaissance fessiale mis à contribution pour trier le bon grain de ce qui était innommable, indicible et inmontrable chauffèrent un peu devant les images ambigües de Saeki, mais dans le doute ne s'abstinrent pas d'effacer tous les contenus suspects. 
A la suite de quoi il devint malaisé de trouver des dessins d'Ero-Guro sur Tumblr. Ou même quelque esquisse de téton ou brouillon d'appendice caudal que ce soit. C'est le problème avec l'intelligence artificielle, elle ne fait pas dans la dentelle.
J'ai déterré un certain nombre d'articles en lien avec l'étonnant disparu, et j'ai appris tout ce qu'il y avait à en savoir dans le petit portrait vidéo concocté par Tracks.
Prudence avec ces images, elles sont neurotoxiques, et tout ce que nous regardons nous envahit.

Ca non plus !
(extrait de l'émission Tracks sur Arte)


Petite nécrologie de Libération


Quelques dessins anciens


Somptueuse Interview avec poison (supplément + 3€)


Encore une biographie, assez détaillée, images inédites


Quelques images ayant survécu à la Purge


Une gallerie assez riche de 2011


Que peut-on dire de gentilde propre et de sain sur Toshio Saeki sans déshonorer sa mémoire ni sa famille ? Que quand il était petit, il a peut-être vécu dans la baie de Minamata, ce qui expliquerait bien des choses.
Et que Cornélius a édité deux de ses livres en France.
Allez en paix.


vendredi 14 septembre 2018

Plume Latraverse - Les pauvres (1978)

En direct de Bourges, au Printemps duquel il vint jadis, Je suis une tombe dévoile le grand plan anti-pauvreté de Plume Latraverse.



Les pauvres ont pas d’argent
Les pauvres sont malades tout l’temps
Les pauvres savent pas s’organiser
Sont toujours cassés
Les pauvres vont pas voir de shows
Les pauvres sont ben qu’ trop nonos
En plus, les pauvres, y ont pas d’argent
À mettre là-d’dans
Les pauvres sont su’l’Bien-Être
Les pauvres r’gardent par la f’nêtre
Les pauvres, y ont pas d’eau chaude
Checkent les pompiers qui rôdent
Les pauvres savent pas quoi faire
Pour s’ sortir d’ la misère
Y voudraient ben qu’un jour
Qu’un jour, enfin, ce soit leur tour
Les pauvres gens ont du vieux linge sale
Les pauvres, ça s’habille ben mal
Les pauvres se font toujours avoir
Sont donc pas d’affaires !
Les pauvres s’achètent jamais rien
Les pauvres ont toujours un chien
Les pauvres se font prendre à voler
Y s’ font arrêter
Les pauvres, c’est d’ la vermine
Du trouble pis d’ la famine
Les pauvres, ça couche dehors
Les pauvres, ça l’a pas d’ char
Ça boé de la robine pis ça r’garde les vitrines
Pis quand ça va trop mal
Ça s’tape sa photo dans l’journal...
Les pauvres, ça mendie tout l’temps
Les pauvres, c’est ben achalant
Si leur vie est si malaisée
Qui fassent pas d’ bébé ! ! !
Les pauvres ont des grosses familles
Les pauvres s’ promènent en béquilles
Y sont tous pauvres de père en fils
C’t une manière de vice...
Les pauvres sortent dans la rue
C’est pour tomber su’ l’ cul
Y r’çoivent des briques s’a tête
Pour eux, le temps s’arrête
Les pauvres ça mange le pain
Qu’les autres jettent dans l’chemin
Les pauvres, c’comme les oiseaux
C’est fait pour vivre dans les pays chauds
Icitte, l’hiver, les pauvres gèlent
Sont maigres comme des manches de pelles
Leur maison est pas isolée
Pis l’ gaz est coupé
Les pauvres prennent jamais d’vacances
Les pauvres, y ont pas ben d’la chance
Les pauvres, y restent toujours chez eux
C’est pas des sorteux
Les pauvres aiment la chicane
Y vivent dans des cabanes
Les pauvres vont pas à l’école
Les pauvres, c’ pas des grosses bolles
Ça mange des s’melles de bottes
Avec du beurre de pinottes
Y sentent la pauvreté
C’en est une vraie calamité
Les pauvres...
... mais y ont tous la t.v. couleur

J'ai toujours été surpris de la profondeur de vue de Plume Latraverse sur la misère humaine, qui relègue Pierre Bourdieu au rang de minus habens de la sociologie.

mardi 12 janvier 2016

Various ‎– Ghosts Of Christmas Past (1981)

(écrit avant la fusion de Bowie avec le Grand Tout)

Et voilà...
Comme Guy Béart et Michou Delpech,
Noël 2015 est dans le tiroir.
J'espère que vous en avez bien profité.
J'ai découvert cette vieille compile, pas moisie du tout, sous le sapinou.
Dire qu'il m'aura fallu 35 ans pour découvrir le "Weihnachtrap" de Tuxedomoon, et tous les autres titres neurasthéniques qui hantent cet album malade, qui me consolent un peu de cette période où l'ordre de jouir retentit tragiquement entre les oreilles de ceux qui sont nés sans aptitudes particulières.
Je n'aurai donc pas vécu en vain.






http://magickrew.magicrpm.com/325508/Chantons-Noel/

http://www.discogs.com/Various-Chantons-Noël-Ghosts-Of-Christmas-Past/release/1180824


http://www.mediafire.com/download/nqrah2q2876tmuz/CH_GOCP.zip

Complément de programme :

Evil twin brother of Father Christmas

samedi 7 novembre 2015

I shall be no more - Coph Nia (2003)




Les mystères de la foi...
Repéré il y a quelques mois sur novaexpress, I Shall be no More m'a bien fait marrer.
La chanson aurait pu être écrite par le Cioran de "De l'inconvénient d'être né".
Mais j'ai mis quelques temps à fouiner plus avant, et à être un peu déçu ...



J'ai trouvé Tree of Life and Death assez ennuyant, pour du dark ambient.
Notre nouvel ami Coph Nia prétend avoir foi dans les Ténèbres.
C'est son choix.
Je trouve dommage de ne pas avoir toujours les moyens de sa prétention :
on voit vite les ficelles de sa petite tambouille.






samedi 4 avril 2015

Le Père Yvon en Inde


Avec sa tronche de Tintin rangé des voitures après le décès de Milou, le Père Yvon était un personnage haut en couleurs.
Il fut brancardier pendant la Grande Guerre, aumônier des terres-neuvas, curé révolutionnaire (s'il n'eut point été Moine, il eut été Rouge) et mille autre choses encore.
Lors de la confection du documentaire qui lui fut consacré, patiemment rapiécé à l'aide de documents d'archives, j'avais recherché plein de musiques traditionnelles indiennes pour coller sur sa période Bangalore; en effet, dans les années 20 il avait tellement mis la fièvre insurrectionnelle en Bretagne que la hiérarchie catholique avait cru le neutraliser en l'envoyant évangéliser les Hindous, où il recommença à mettre le feu partout en s'insurgeant contre le système des castes, la doctrine de la réincarnation et de la dette karmique, qui justifie par avance une stratification sociale immuable où nulle lutte des classes ne peut faire bouger les lignes de l'oppression (castes hautes contre castes basses, Brahmanes contre Intouchables)...
...et puis finalement la plupart des séquences ont sauté au montage.
Y'avait deux réalisateurs sur le coup, la production avait un peu merdé, et le montage a duré tellement longtemps que certains des interviewés, qui avaient connu de visu le père Yvon, mort au début des années 50, ont fusionné avec le grand Tout pendant la post-production.
Ils n'étaient plus de la toute première fraicheur, comme on dit.
Ca ne s'invente pas.
Et je suis resté avec ma bande originale d'un film indien qui n'existait plus dans sa version 5.2.
L'occasion de se replonger dans ces mélopées issues de voies purement dévotionnelles:
 tablas, sitars et gémissements.
Voici cet oeuf de Pâques.

Le Père Yvon fut lauréat de la Société d'Encouragement au Bien. 
Pour le mal, nul besoin de sponsor, et encore moins de majuscule.








http://www.mediafire.com/download/hs75td43rod0cki/Le_Père_Yvon_en_Inde.zip

samedi 22 novembre 2014

Tuxedomoon - 59 to 1 Remix (1980 B-Side)


Parce que quand on aime, on a toujours 20 ans, et qu'à l'époque, j'ai aimé Tuxedomoon bien plus que mes parents. C'est un peu ballot, d'ailleurs, parce que la différence entre mes parents et Tuxedomoon, c'est que mes parents ils ont fait ce qu'ils ont pu, alors que Tuxedo ils ont fait ce qu'ils ont voulu...
Bref...
Le nombre de clips d'art vidéo que j'ai tournés/montés sur les morceaux de Tuxedo...
Ca a changé ma vie.
Sans compter le fait qu'ils m'ont invité au restau, et que c'était des gens aussi joyeux que leur musique était triste. Moi qui vous cause, j'ai vu Blaine Reininger se mettre une langoustine dans le nez pour faire rire ses collègues...
Ah oui, et ils viennent de sortir un nouvel album à ma gloire : Pink Narcissus.
Dommage qu'il soit un peu mou du genou, il n'a manifestement pas été dicté par cette urgence qu'on a quand on est jeune et qu'on retrouve quand on est vieux.



Tuxedomoon is an experimental, post-punk, new wave band from San Francisco, California, United States. The band formed in the late 1970s at the beginning of the punk rock movement. Pulling influence from punk and electronic music, the group, originally consisting of Steve Brown and Blaine L. Reininger, used electronic violins, guitars, screaming vocals and synthesizers to develop a unique "cabaret no-wave" sound. Bassist Peter Principle joined the band and in 1979 they released the single "No Tears", which remains a post-punk cult classic. That year they signed to Ralph Records and released their first album, Half-Mute. Eventually Tuxedomoon relocated to Europe. The band separated in the early 1990s, only to reunite later that decade. They have remained together since, releasing their latest album, Pink Narcissus, in 2014.



Pour Val, qui m'a rappelé avant-hier que j'avais mieux évoqué Tuxedo ici, du temps où j'avais des mots dans mon sac à mots.

mercredi 2 juillet 2014

Batards & Avatars

Si j'avais le choix, il ne serait pas funéraire.
N'empêche que la concurrence devient rude sur le segment de marché des blogs tombaux.
Je note l'éclosion d'une concurrence toujours plus rude, formée à l'école des pays de l'Est, où la mise en bière n'est pas soumise à des charges patronales exorbitantes.


Des cendres à la cave 
Des notes dans la pénombre
L'enclume des jours

samedi 7 juillet 2012

Avec pas d'casque - Dans la nature jusqu'au cou (2008)

Lu dans les Inrocks, testé puis acheté ici :
un groupe folk québécois.
c'est assez pur et poétique.

La pochette est au delà du laid, même Pierre La Police est enfoncé, ce qui ne gâte rien.

"Je relie les points mais je vois pas la forme
Vire de bord crie mon instinct au bout d'sa corde
Il faut se voir davantage 
Il faut se voir
J'avancerai avec des intentions honnêtes
Tu sauras quoi dire pour apaiser le singe"

Evidemment, c'est complètement débranché, mais ca se dit comment unplugged en québécois ?
Et qui ne rêve d'être débranché un jour ?