lundi 17 juillet 2023

Alexandre Desplat - Asteroid City Soundtrack (2023)

Quand je suis allé voir Asteroid City au cinéma, je n'ai pas compris de quoi ça parlait. 
J'ai cru que c'était une métaphore sur le deuil et la mélancolie, et aussi peut-être une parabole sur "le cinéma, art de l'hypnose", à partir de l'exposition brindezingue d'une séance d'hypnose volontairement ratée, parce que le cinéaste déguisé en conteur déguisé en metteur en scène de théatre déguisé en thérapeute dirige constamment notre attention lucide et consciente vers ses "trucs" d'hypnotiseur, ce qui nous interdit de nous laisser endormir - la chanson "You Can’t Wake Up If You Don’t Fall Asleep" qu'on entend au générique de fin est particulièrement explicite à ce sujet - et le film est excessivement stylisé, et démonstratif, et redondant envers ses propres tics, un peu comme si je mettais plein de virgules dans cette phrase, et que je les soulignais en rouge, et chaque début d'installation de narration ou de climat émotionnel est rapidement brisé par l'irruption d'éléments méta-fictionnels venant nous rappeler à quel point on n'est pas en train de nous raconter une histoire mais de nous tenir un discours sur la façon dont les histoires s'écrivent. 

C'est en rentrant chez moi une semaine plus tard que je l'ai regardé d'un autre oeil, en comprenant qu'il empruntait beaucoup à la logique onirique, de ces rêves dont les acteurs incarnent des fonctions psychologiques plutôt que des personnes, de ces rêves qui tournent un peu en rond avec une voix off délirante et un niveau technique surréaliste dont la mécanique se révèle constamment défaillante, comme un tour de Luna Park éreintant dans le cerveau de Wes Anderson ruminant ses clichés hypnagogiques sur le peuple nord-américain, dans le pépiement agaçant de grands acteurs sous-employés, dans un chatoiement fluo mais tirant déjà vers le sépia de légendes modernes esquissées puis avortées par l'irruption constante d'autres éléments tout aussi hétéroclites, névrotiques et absurdes. 


L'illustration résume bien le film :
Anderson dynamite toutes les histoires,
et vous allez me dire, il reste un cratère.


9 commentaires:

  1. Mais alors est-ce qu’elle est bien cette musique ?

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  2. Non la musique écrite par Alexandre Desplat je la trouve un peu plate. Alors que le film s'étouffe lui-même à force de vouloir faire semblant de dire tellement de choses de façon assez alambiquée.

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    1. Ça m’inquiète. J’adore le cinéma de Anderson mais son précédent a été démonté par les critiques - du coup je ne l’ai pas vu.

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  3. Dans French dispatch il se fout de la gueule des Français. Dans l'astéroïde City il se moque des Américains choisis ton camp

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    1. hummmmm. Mais dans La vie aquatique, il se moquait des poissons ?

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  4. ( dictée avec la bouche depuis mon smartphone)

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  5. Pour French Dispatch, les clichés américains sur les Français qui lui servaient de liant faisaient parfois sourire du coin des lèvres. Mais le récit, tenant plus du déconstructivisme que d'autre chose, était un labyrinthe confus et fastidieux... Seules consolations, la joliesse du cadrage et des nuances pastels charmantes d'un Paris de carte postale.
    J'ose croire que Wes Anderson est moins idiot que d'autres. Il s'est rendu compte qu'une histoire dénuée de substance n'intéresse personne. Pour parer à cela, il a ajouté un niveau d'abstraction à Asteroïd City, nous invitant à ne pas simplement le considérer comme une accumulation intentionnelle d'inepties dont il serait le seul responsable, mais comme l'histoire d'une accumulation intentionnelle d'inepties par un artiste hors du commun. C'est en quelque sorte dans le même esprit que le "Pierre Ménard auteur du Quichotte", et autres Fictions de Borges.
    Hélas, bien que l'image, les décors, la direction et le jeu des acteurs soient extraordinaires, l'ensemble ne parvient toujours pas à convaincre.
    Dans le Pierre Ménard, il y avait une idée. Dans Asteroïd City, qui parviendra à distinguer le sujet principal sera bien inspiré. Le deuil ? Ma compagne y a vu aussi cette interprétation, mais ce pourrait être une extrapolation due à une déformation professionnelle. En vérité, la mort de la femme laisse tout le monde indifférent - à l'exception du père qui le cache parfaitement. Pour ma part, je spécule que le film est une critique de l'Actors Studio. Cela expliquerait plusieurs scènes dans lesquelles Scarlett Johansson, Margot Robbie ou Willem Dafoe insufflent une intensité incroyable à des dialogues vides - sans pour autant en révéler un sens caché ou la moindre profondeur !

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  6. Je plussoie grave. Le dernier film de Wes Anderson dans lequel j'ai capté un sujet c'était le grand Budapest hôtel. Il est bien parti pour déconstruire jusqu'à plus soif.

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  7. Une voix grave à la Léonard Cohen. Sympa.

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