(Monologue enregistré avec 16 tonnes de réverbe et des très mollos dans la voua)
C’est dimanche. Matin. J’ai allumé les candélabres dans ma modeste église : la salle de montage 4 d’une station de télévision régionale. C’est encore moi qui suis de garde pour le sermon dominical. J’y étais prédestiné : mon nom de famille, au civil, désigne le curé de la paroisse, dans une langue celtique de la branche brittonique encore parlée dans l’ouest de la France. Y’a un moment, faut faire avec ce qu'on a reçu, et accepter ses prémisses de prêcheur en chaire.
Brothers and Sisters, ces derniers temps, j'étais dans le noir, puis j'ai reuçu la lumière, en plein sur la rétine de l’oreille. Je ne m’y attendais plus. Mes regrets éternels mais relativement récents (qui datent en vérité de cet été où je suis passé à Apt, berceau du groupe), de n'avoir pas vu plus souvent Raoul Petite en concert ou de ne pas m'être plus ébaubi la pointe à l'écoute de leurs disques m'avaient conduit au fond du trou. D’où je contemplais d’un œil morne la disparition du spectacle vivant, puis les mots « concert » et « festif » seront prochainement effacés du dictionnaire. Sans parler de l’effondrement probable du « collectif » Raoul Petite réuni autour de Carton, son chanteur et seul membre permanent, comme Robert Fripp avec King Crimson mais en un peu plus fun, Carton qui n’est pas éternel et qui a déjà 70 ans, et « collectif », un nom qu’on ne donne plus guère, l’individualisme a eu sa peau. Du fond du puits où la dépression m’avait jeté, je m’apprêtais à me crever l’œil avec une chandelle de bois pour ne plus voir ni cette misère ni la mienne.
Et l’inconscient, qui fait quand même bien son boulot, m’a miséricordieusement glissé un CD d’un autre collectif, Alabama 3 : un groupe britannique mélangeant rock, électronique, blues, country, gospel, acid house et franc parlé, fondé à Brixton, en 1995.
J'en avais parlé, de façon confuse, début 2012.
Avec des phrases sans verbes, et parfois même sans sujet.
Faut dire que début 2012, je découvrais les effets des antidépresseurs sur les bipolaires : c'est carrément contre-indiqué, mais en attendant j'ai bien plus ricané qu'avec de la bête coke.
Aujourd'hui j'expérimente sans produit la sortie d'un coffret hyper-luxe de 5 CD célébrant le (presque) jubilée de leur premier album effectivement jubilatoire et qui n'a fait que se bonifier avec le temps, bourré d'inédits qui auraient gagné à le rester, et qui m'a l'air tout à fait dispensable, à part pour le livret et les morceaux de l'album original (les pistes 37 à 48 de la playlist bandcamp).
"Alabama 3 is a pop band. A punk rock, blues and country techno situationist crypto- Marxist-Leninist electro pop band. (..) We want to make you feel good. We know you've had trouble in your life, real bad trouble. We know you've got debts. We know you've had your heart broken so many times you're still finding pieces of it in your pillow. Maybe you've done some good things in your life, maybe you've done some bad things. We forgive you. Forgive yourself. Then dress up real sexy and come and party with us. We'll look after you. That's a promise."
Ah oui ils chantent "Let’s go back to church". Tout s’explique, Martin (dimanche).
RépondreSupprimerJe ne sais jamais s'ils brocardent ou adoubent les évangélistes, les dopés, les communistes, les alcoolos, repentis ou non, mais je ne m'ennuie jamais une seconde à essayer de décoder leurs chansons. Il y a une charge corrosive dans les textes et une puissance inattendue dans leur hybridation musicale. Raoul Petite ne fait pas le poids. Ramon Pipin l'a fait, mais il y a longtemps. Vive les rosbifs.
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