J'ignore pourquoi Caza n'a pas connu la même reconnaissance publique que Druillet, Bilal ou Moebius, au bon vieux temps de Métal Hurlant. Peut-être parce qu'il était surtout publié dans Pilote. Ils en venaient tous, mais lui y est resté plus longtemps que les autres. Il fallait bien qu'il y en ait un qui se dévoue pour garder Goscinny. Pourtant, les histoires d'anticipation écolo-gauchisto rassemblées dans les 3 tomes de Scènes de la vie de Banlieue n'étaient sans doute pas vraiment du goût de Goscinny, qui n'y survivra que jusqu'en 77.
Quelques décennies plus tard, ces mauvaises blagues sonnent très Métal, dans l'esprit de la littérature de SF dépressive de la fin des années 70 qui avait pour mamelles la pollution, les brutalités policières de l'Etat-fasciste, et la médiocrité de la plupart des aspirations humaines. On ne peut pas dire qu'on ait vraiment changé de braquet, sauf sur le sexisme ordinaire. J'y vois même des connexions avec les comix underground de Zap Comix qui ont commencé à mettre le feu à la BD américaine dès 1968, mais ça doit être tous les médicaments que je ne prends pas qui me montent à la tête.
L'édition originale (et à couverture molle) de la trilogie.
Elles furent d'abord rassemblées sous forme d'albums souples, moches et pas chers, puis "en dur" chez Dargaud Fantastique, et finalement rachetées pour une poignée de brouzoufs par les Humanoïdes associés, avec de nouvelles couvertures qui n'ont plus grand chose à voir avec le style Caza Canal Historique, pop-art flamboyant, Caza aussi à l'aise graphiquement dans la caricature que dans l'hyper-réalisme verdâtre des banlieues rêvées, et surtout cauchemardées, pas très loin des novellistes anglo-saxons de l'époque, professionnels du désenchantement humaniste comme J.G. Ballard. Avec une petite touche d'humour crétin issu de la tradition française. Et des couleurs d'une violence psychédélique rarement revue dans la BD francophone. Il y a même une histoire de pirates à bord d'un pavillon en meulière qui pourrait être un préquel de The Crimson Permanent Assurance, le court métrage réalisé par Terry Gilliam en 1983 et diffusé en tant que prologue du film Le Sens de la vie. Je suspecte fortement Gilliam de l'avoir vu avant de construire son scénario, mais je n'ai pas de preuves. Je vais lui écrire.
Les liftings successifs des couvertures, fluctuantes selon les éditeurs. Je ne sais pas si on gagne en lisibilité.
Comme le dit l'auteur dans son auto-bio, "dans ces chroniques, basées sur une satire acerbe de la vie moderne et sur l'intrusion du fantastique dans le quotidien, je me mets moi-même en scène comme personnage principal de mes histoires (déjà égocentrique), en éternelle opposition à mon voisin du dessous (ou du dessus, ça dépend), Marcel Miquelon, archétype de français (très) moyen."
une blague postcoloniale comme même le Major Grubert ne peut plus en faire.
Reproduit ici à un format trop petit pour pouvoir prétendre au rang de la contrefaçon, le Tome 2 des Scènes de la vie de Banlieue conserve une saveur vintage, en même temps qu'il est un témoignage sur l'imaginaire de la concentration urbaine vu par un gauchiste qui était déjà parti vivre dans les Cévennes avec des fromages de chèvre, contrairement à ce que prétend son avatar auto-fictif qui apparait souvent dans les couloirs de ces HLM de papier sous les traits d'un géant roux aux traits harmonieux et sculpturaux. Mon oeil : quand on est vraiment un géant roux aux traits harmonieux et sculpturaux, on n'a pas besoin de faire de la BD pour épater la galerie. A part Geoff Darrow, dont il est difficile de savoir s'il était roux avant d'être fou chauve.
Caza abandonnera ensuite totalement cette veine humour noir pour se tourner vers une SF mysticoïde un peu fumeuse, avec toujours autant de moyens graphiques mais c'est là que je le perds de vue, préférant alors m'abimer dans la contemplation des tranches des volumes traitant du bouddhisme au rayon spiritualité de la FNAC, afin de progresser dans l'intention de le pratiquer.
la French Touch du psychédélisme, c'est là qu'elle était.
extrait de « Mes moires, un pont sur les étoiles » par Jean-Pierre Dionnet :
"Le Club du Livre d'Anticipation a fait connaître aux lecteurs français les plus grands noms de la science-fiction classique, d’Asimov à van Vogt, de Philip José Farmer à Edmond Hamilton et de Philip K. Dick à Catherine L. Moore. Les couvertures étaient souvent illustrées par Druillet, Mœbius ou Philippe Caza, un auteur que l’on retrouvera dans les pages de Métal hurlant. Caza était renommé pour ses illustrations et Mœbius était impressionné par son dessin. Quand il débarquait dans les bureaux de Métal hurlant, on sentait qu’on avait affaire à quelqu’un qui vivait au grand air. Il m’avait épaté avec Sanguine, une histoire muette que nous avons publiée dans le n° 12. Ce n’était pas évident de passer derrière Arzach pour se lancer dans un récit sans texte, mais il s’en était tiré avec brio."
Reproduit ici à un format trop petit pour pouvoir prétendre au rang de la contrefaçon, le "Caza" paru dans la collection 30x30 aux Humanoides Associés est un recueil de ses illustrations pour des romans de SF dans les années 70. Certes, Caza débutait (moins de 10 ans de carrière) et a fait beaucoup mieux depuis. Mais pour les gens qui découvrirent cet illustrateur à la fin des années 70, le choc visuel demeure.
Encore plus flippant que Le complot contre l'Amérique de Philip Roth : et si la vague rock n'avait jamais traversé l'Atlantique ? Si Vian et Salvador avaient durablement discrédité cette musique de posture, empruntée aux Noirs et customisée par des petits Blancs que la taille de leur organe a rendu hargneux ? Et si le gouvernement de Guy Mollet avait pris des mesures radicales pour préserver l'exception culturelle et la flore locale, Gréco, Brassens, Brel et Patachou ? Je vous laisse imaginer la dystopie de guitares en bois d'arbre découlant de ce non-évènement. Seuls les Quatre Barbus, Maxime Le Forestier, Yves Duteil, Camille et Arlt auraient émergé. Car 65 ans après l'invasion du rock'n'roll en France, il est temps de tirer un premier bilan de l'acclimatation de cette musique de sauvages sur le territoire, ce folklore truffé d'injonctions grotesques à la jeunesse de fumer la chandelle hédonique par les deux trous, qui a bien contaminé l'imaginaire national, et pour quel résultat ? A Valeurs Actuelles, nous n'avons pas peur des vraies questions, quitte à fâcher.
Si l'importation du rock'n'roll avait foiré, suite au sabotage de Salvador et Vian en 1956, ni les poses d'Elvis, ni les gémissements phéromonés des Rolling Stones ne me manqueraient. Le deuxième album de Cure, le premier des Damned, des Clash, des Ruts et des Sex Pistols, un peu plus. Et le Wish You were here de Pink Floyd, parce que c'est triste et beau. C'est eux les vrais enfants du rock. Pas Manoeuvre et Dionnet.
Mais sans le rock, on n'aurait pas connu non plus le métal progressif instrumental, et ça, ça serait quand même une grosse perte, même si quand on est embarqué dans une dystopie, on voit pas trop ce qu'on a perdu à ne pas suivre l'autre embranchement, vu qu'il n'a jamais existé. Sauf si on s'amuse à tirer le Yi King dans le Maitre du Haut Chateau de Philip K. Dick, et qu'on en vient à la conclusion que c'est la réalité qui se trompe.
Au commencement des temps métalliques progressifs instrumentaux, il y a King Crimson, qui après avoir navigué sur d'indistincts océans psychédéliques non encore cartographiés, découvre à bord d'un frêle esquif le continent noir du métal progressif instrumental dès 1974 avec son album Red, et y établit une colonie de peuplement.
C'était raide, Red, mais en 74, on l'était tous.Enfin, moi j'avais 11 ans, mais je me suis rattrapé quand j'ai atterri à la fac et découvert l'album et les pétards pour manger avec, un septennat plus tard. Nous grimpâmes au rideau, dont jamais je ne redescendimes vraiment. La preuve.
Puis en 81 advint Mitterrand et l'incarnation suivante de la PME King Crimson aka Robert Fripp & Associate Slaves, en quatuor à pétrole thermonucléaire, avec des tempi inhumains et un stakhanovisme auriculaire qui déboite des deux mains, pour interpréter des harmonies profilées comme des théorèmes concourant au Prix Nobel des Mathématiques.
Tony Levin était à la basse, ou plutôt au Chapman Stick, pour les 3 albums rouge/bleu/jaune, de moins en moins inspirés mais impeccablement exécutés par nos fines lames. A l'époque, Tony, qui ressemble déjà à un Tarass Boulba mâtiné de Gurdjeff, dira de son propriétaire/employeur que c'est un mélange de Gandhi, de Staline et du Marquis de Sade.
Le stagiaire de France 3 commence à accorder le Chapman Stick, au moins 8 heures avant le concert
Tony a beaucoup fait pour populariser le Stick ou Chapman Stick, du nom de son concepteur, d'ailleurs à ma connaissance c'est le seul gars capable d'en jouer. Je crois qu'il faut au moins deux cerveaux. Le stick est dérivé de la guitare, et comporte huit, dix ou douze cordes séparées en une partie mélodique et une partie basse. Sa singularité est que ses cordes sont frappées avec les doigts selon la technique du tapping à deux mains ou touch-style. Il permet un jeu nettement plus polyphonique qu'un instrument à corde plus classique, ce qui le rapproche des instruments à clavier. Les cordes de la partie basse et de la partie mélodique sont d'ailleurs amplifiables séparément. N'empêche que l'intro au stick de "Elephant Talk", en 81, est une tuerie. Et pas que sur le plan technique.
Nous à l'époque, quand on joue du stick, des deux mains on le roule, puis de l'une on le porte à la bouche, de l'autre on l'allume, et après, en général, on s'éteint. C'est stupéfiant. Alors que Tony, lui, ne chôme pas : quand ça le saoule, les purges staliniennes chez Robert Fripp & Associate Slaves, il a de la ressource. et il va cachetonner chez Paul Simon, David Bowie et Peter Gabriel, la liberté consiste à faire tout ce que permet la longueur de la chaine, y'a pas de souci.
Baygon rouge, bleu et jaune, les trois font la paire (de 1981 à 1984) mais déchainent l'enthousiasme plus au début qu'à la fin. Comme moi avec ma femme.
Dix ans plus tard, et n'ayant rien fichu de leur quarante doigts pleins de phalanges entretemps, si l'on passe sous silence les doigts de pied, sinon ça monte à quatre-vingt, nos amis métalliquement et progressivement expérimentaux de King Crimson partent en tournée au Japon, et en mettent plein la vue aux Nippons. (je viens de retrouver mon rip déjà ancien du DVD Deja-VROOOM enregistré à Tokyo en Octobre 1995, et il faut bien que je l'amortisse.)
Tony Levin et son Chapman Stick.
N'aie pas peur de cliquer, ce n'est pas sale.
Comme le remarque un consommateur éclairé de chez Ah ! ma zone, c'est un grand concert. Super musique etc... Cependant la qualité de la sortie est de la merde. Mauvaise qualité du son, qualité fatale de l'image. Je ne sais pas comment un si grand groupe sort si mal. Il n'a pas tort. Il n'a jamais entendu parles du syndrome des cordonniers mal chaussés. Mais qu'importe le flacon ?
ben finalement, si, quand même, un peu.
Je ne regarderai pas la saison 2, parce que les humains y sont beaucoup plus cons que les robots, et c'est un peu déprimant. En plus ceux qui jouent le mieux sont ceux qui jouent les plus cons.
Les Nippons se vengeront en pilonnant tous les albums de Buck Danny et ses Frippertronics, et en renvoyant J.G. Ballard en Angleterre (alors qu'il avait été emprisonné dès 1942 dans un camp de détention pour civils jusqu'à la fin de la Seconde Guerre mondiale de façon à pouvoir y écrire Empire du Soleil et le vendre ensuite à Spielberg).
Ils renvoient aussi Lisette Pagler en Suède, elle qui était pourtant née en Corée du Sud, et qui fut abandonnée par ses parents lorsqu'elle avait 2 ans.
Quand elle sera grande, elle sera chanteuse suédoise, et elle jouera le rôle du robot Mimi/Anita dans la série Real Humans, et même Jean-Pierre Dionnet tombera amoureux d'elle, et ça sera bien fait pour lui.
Pendant ce temps, Tony Levin qui attendait son heure, profite de cette habile diversion pour former en 1998 le super-groupe Liquid Tension Experiment, avec des transfuges de Dream Theater. Un super-groupe désigne un groupe formé de membres déjà connus et reconnus dans d'autres groupes, tout comme un super-blog désigne une plate-forme collaborative où se succèdent à la rédaction mes quarante-deux sous-personnalités, comme le maire de New York dans le Promethea d'Alan Moore.
Et c'est ainsi qu'au sein du premier album de Liquid Tension Experiment, le pire et le meilleur du métal progressif instrumental se côtoient, s'enlacent parfois pour un coït furtif en 3 secondes chrono, puis finissent en désaccord total sur qui va garder les gosses nés de leur union, car le métal progressif instrumental est une musique exigeante mais terriblement datée, clinquante et vaine quand elle s'épuise en technicité pure, au mépris de la sensibilité. Le disque est à la fois pompier, et pyromane. Et sans doute plus agréable à jouer qu'à écouter, ou alors ils sont bien masos. Il y a des moments où ça lorgne vers des extases électriques à la Mahavishnu Orchestra, d'autres où ça ne peut séduire que des ados en mal de démonstration de puissance. Et les morceaux plus doux révèlent une attirance gênante vers le sucré. C'est pour masquer cette appétence coupable qu'ils font tant de bruit ? Alors que quand on n'a que l'amour à s'offrir en partage, on gratouille mollement des guitares en bois d'arbre, on ne reçoit pas d'alertes inutiles sur son smartphone, et on est quand même moins speedé, sans même avoir lu Alain Damasio.
Levin me semble mieux inspiré sur un autre side-project avec son compère Bill Bruford, lui aussi débarqué de Crimson à la fin des années 90 : le Bruford Levin Upper Extremities
Tony Levin cessera dès lors de participer aux reformations, épurations et refondations de King Crimson, s'épargnant des purges de métal progressif expérimental dont même les chirurgiens dentistes ne rêvaient pas pour couvrir les hurlements de leurs patients les plus chochottes.
Warsen ne découvre l'existence du groupe qu'en 2021 alors que les fichiers trainaient sur son disque dur depuis 2015, puis se repent amèrement d'avoir consacré sa vie diurne à des âneries, et espère voir le groupe en concert au festival des vieilles charognes l'été dernier à Marienbad Landerneau, puisque le super-groupe vient de se reformer après vingt ans de sieste, pour un troisième opus dont on se demande bien qui va se risquer à l'écouter. Tony Levin a presque 75 ans, si il carbure à ce que je pense, il faut tout de suite appeler la Préfecture pour tester ses urines.
Lemétal progressif instrumental connaitra de très riches heures circa 2015 avec Guillaume Perret & The Electric Epic, autour de l'album Open Me, mais ce sera une autre histoire.
Je suis né avec des yeux d'ange Et des fossettes au creux des joues J'ai perdu mes joues et mes langes Et j'ai cassé tous mes joujoux (Clopin-clopant, aussi chanté par Montand, et écrit par Pierre Dudan)
Dans la pile de centaines de papyrus et de tablettes de cire exhumés de la crypte secrète de la nécropole maudite et oubliée d'Henri Salvador, cette biguine de 1954 résonne d'un écho particulier.
D'abord parce que toutes les versions trouvées sur youtube ont été remixées avec de la réverb, ce qui dénote d'un manque d'élégance et de courtoisie envers les artistes morts, et qui m'a contraint à repartir du master original, négocié à prix d'or auprès de Toutânkhamion, un trafiquant d'art du Caire, spécialisé dans le commerce des sarcophages suspects, gros et demi-gros.
Ensuite parce que l'argument développé, qui commence comme toutes les romances - Marivaux, Giraudoux, Barbara Cartland - tourne abruptement à la fable mesquine sur les mirages et déconvenues de l'amûûr une fois que la banane s'est dégonflée, et que c'est une mauvaise blague joliment troussée.
Bien mieux que chez Houellebecq, par exemple. L'interprétation est jubilatoire, annonçant pourtant les crétineries futures du pitre Salvador et les sanctifiant par avance, ou en retard si on vivait dans un flux temporel inversé comme dans Peppermint Candy.
Une excellente surprise, qui tourne en boucle depuis 15 jours, et qui commence à lasser les amatrices de Jorja Smith de moins de 26 ans dans mon entourage proche, surtout quand je l'alterne avec l'intégrale des Quatre Barbus.
L'amour prétendument vécu comme un don, alors qu'on sous-entendait l'échange et la réciprocité. Et blam, la cabane sur le chien. Tant mieux, c'est plus honnête. C'est pas pour faire mon Morizot, mais si la Nature nous avait câblés des aptitudes au don inconditionnel, l'espèce humaine serait éteinte. On n'en est peut-être pas loin, du fait de l'excès inverse, n'en déplaise aux déclinistes.
"Les philosophies les plus altruistes et les plus viables échouent face à l'intérêt personnel, cet impératif brutal du tronc cérébral."(Peter Watts)
La galette de cire de « Elle me donne »
retrouvé dans la chambre funéraire
de la Pyramide de Salvador
et gravée en 78 tours cunéiforme
est en vente 24,50€
sur archine.com
Et encore : "Nous nous percevons comme des réservoirs vides ne demandant qu’à être comblés, et l’autre devient alors cette source à laquelle nous aimerions nous abreuver. Qu’il s’agisse d’une rencontre avec un maître spirituel ou avec une maîtresse ou un amant, nous devons réaliser que cette manière de rencontrer l’autre comme s’il était source de notre plénitude est une erreur fondamentale.
Je ne dis pas que les relations doivent être évitées mais qu’elles doivent être vues pour ce qu’elles sont : des lieux possibles d’expression de l’amour mais pas des échoppes où l’on viendrait s’achalander." (Thierry Vissac)
Tout ça dans une bête chanson d'artiste de variétés.
Elle est pas belle, la vie ?
Déstockage monstre (avant les soldes d'été) sur les citations à la con et les vieilles chansons inspirées. Tout doit disparaitre.
Je découvre les CDs 3 et 4 de la compilation des Quatre Barbus présentée tantôt.
C'est du lourd.
A côté de versions édulcorées de chansons paillardes - on ne pouvait pas enregistrer sur disques de tels brûlots cochons avant que Jean-Marie Bigard ne s'arroge vers la fin du XXeme siècle le monopole de la vulgarité et confonde un peu exprès la licence poétique, la licence IV et le complotisme de sous-bois - à côté aussi de chants de marins qui rappellent l'éternité de toute souffrance humaine, mais comme le dit Jean-Pierre Dionnet « Ma vision du monde est positive, je pense que l’être humain est foncièrement mauvais, mais je pense aussi que nous avons le choix de ne pas l’être », je reste interdit devant la puissance d'évocation de chansons comme "Le grand Lustucru" qu'on dirait écrite par Stephen King pour faire se conchier nos chères têtes blondes avant de regarder Candyman, alors que ce génial blog déniché dans la foulée l'attribue à Kurt Weill et m'en apprend tout ce que je brûlais d'en savoir tout en ignorant que j'avais tant soif de connaissance.
La version des Barbus n'est ni pire ni meilleure que celle de Laura Betti ou des 128 autres versions recensées par « Je pleure sans raison que je pourrais vous dire » depuis que Théodore Botrel s'est inspiré d'une chanson traditionnelle qui remonterait au XVIIe siècle pour en publier un prototype de chanson à endormir les enfants par stupeur d'épouvante.
Attention à ne pas confondre ce grand Lustucru, cousin familier et néanmoins terrifiant du grand Cthulhu par le biais de quelques permutations de lettres dont les mélenchonistes désappointés ont le secret, avec le Père Lustucru tel qu'il apparait dans cette comptine pour enfants pubères de Colette Renard, sinon finie la garantie.
Les Quatre Barbus est un groupe vocal français de quatre chanteurs portant la barbe (éventuellement fausse), fondé en 1938, qui connut son plus grand succès dans les cabarets parisiens des années 1950 puis, par le disque, dans les années 1960.
Le groupe a fait ses adieux en 1969. (wiki)Bref, je vous parle d'un temps que les moins de 70 ans ne peuvent pas connaitre, et pourtant je ne les ai pas, même si ça commence à me tirer sur la couenne.
En France, pays de la diversité et du rayonnement culturel fossile, on trouve antoutépourtou au choix dans le commerce soit L'Anthologie 1938-1962 triple album de Frémeaux sorti en 2016, soit le quatuor de cédés Honneur aux barbus de 2019 chez EPM. Qu'on peut aussi pré-entendre chez qobuz :
Je diffuse les 2 premiers cédés downgradés de la compilation EPM qui en compte quatre, et déjà c'est beaucoup trop. Leur écoute en continu provoque de sévères troubles conscientiels contre lesquels même Jean-Baptiste Morizot n'a pas de solution.
Une fois que ma proposition musicale vous aura envoutés, pour tout achat de l'album, le ministère du Blasphème et du Download vous offre un livre : "Comment vivre avec une victime des Quatre Barbus : Le traumatisme des proches," dédicacé par Manuel Valls, une lecture saine et utile utile pour les conjoints devant surmonter au quotidien le fléau sonore.
« Bad 'Lias » Hatfield refuse de rembourser une dette à Tolbert McCoy.
Le refus dégénère en bagarre entre les frères McCoy et les cousins Hatfield, durant laquelle les McCoy poignardent 27 fois Ellison Hatfield et lui tirent dessus en prime, ce qui ne l'empêchera pas de raconter à son frère ce qui venait de lui arriver (lire ce pittoresque compte-rendu de 1957 pour plus de détails sur la scène).
Le clan Hatfield en 1897.
Le photographe ne s'est pas risqué à leur demander de sourire.
Début de la vendetta, qui les voit s’exterminer les uns les autres pendant plus de vingt ans, pour des affaires de terrains, de cochons volés, d’unions contestées et d’à peu près tout ce qui se passait sur leurs lopins de terre, qui se font face sur les deux rives de la Big Sandy Riverqui sépare le Kentucky de la Virginie Occidentale.
Suite à l'effort de guerre consenti par Oncle Walt pour faire des films de propagande, les caisses du studio Disney sont vides. Il a passé quatre ans au service de l'U.S. Army, à produire des films de soutien aux troupes ou de mobilisation de l'opinion publique.
Le studio cherche à réitérer le succès de Fantasia, et met en production La Boite à Musique, un film animé composé de séquences musicales. L'une d'entre elles prend pour sujet la rixe Hatfield-McCoy en lui faisant subir une disneyification massive, ce qui la rend méconnaissable et curieusement proche des cartoons de Tex Avery. En France, le segment Hatfield-McCoy devient "les Martin et les Blaise", et l'interprétation de la chanson qui accompagne le film est confiée au « Quatuor vocal des Compagnons de Route », qui deviendra trois ans plus tard les Quatre Barbus.
En 1948, Rachida Dati tente une médiation entre les deux clans, mais c'est un échec.
1947
Après plusieurs décennies sans rififi ni victimes, Allen Hatfield, chef de la police locale, fait une descente dans un bordel. Un des clients, énervé, prend le pistolet d'un autre officier de police présent et tire dans le dos d'Hatfield, deux fois. Le chef de police se retourne et tue le client, qui s'avère être un McCoy. La vendetta reprend.
Pendant ce temps,La Boite à Musique marque la rupture entre Walt Disney et l'intelligentsia qui l'a tant encensé durant les années 30. Les critiques conspuent le manque d'ambition affiché par rapport aux long-métrages de l'Age d'Or comme Blanche Neige. Lefilm a récolté un prix à Cannes en 47, mais il ne sera plus jamais présenté au cinéma. Pire, il sera démembré, et ses séquences diffusées séparément. Certaines connaitront à nouveau l'honneur des salles obscures entre 1954 et 1955. Le segment "les Martin et les Blaise" disparait des écrans, le sujet des armes à feu devenant polémique.
Ils ont peut-être des tronches de cake, mais ils sont capables de chanter (juste) des harmonies à quatre tons différents en simultané.
Les Quatre Barbus se séparent après avoir écumé toutes les scènes de France et enchanté des générations de spectateurs. Leur génie vocal a été gravé dans la cire, à travers une trentaine de disques de chansons réalistes, paillardes, rive gauche, traditionnelles, de marins, de forçats, de détournements signés Piere Dac / Francis Blanche, de la Commune de Paris (parfois sous le pseudonyme de "Groupe 17") et même un 33 tours de "Chansons anarchistes".
Le long métrage La Boite à Musique est englué dans un imbroglio juridique empêchant toute commercialisation sur le territoire français. Bien qu'une première édition DVD fut envisagée en 2003, finalement annulée, puis une seconde en 2015, qui connait le même sort, La boite à musique n'a jamais été commercialisée à ce jour sur aucun support en France. Bien que quelques éditions DVD étrangères officielles existent, le long métrage n'est pas disponible non plus sur Disney+ à l'heure actuelle. Une version restaurée en haute définition circule cependant depuis quelques mois sur des forums chinois, sans que l'on en connaisse l'origine exacte. Pour les collectionneurs compulsifs, ça fait comme un trou sur leur étagère, et c'est la mémerde.
2011
Kevin Reynolds met en scène Kevin Costner dans une mini-série relatant la tuerie entre les frères McCoy et les cousins Hatfield. On a connu Reynolds plus inspiré, avec La Bête de guerre, et moins inspiré, avec Waterworld, dans lequel jouait aussi l'autre Kevin. Il existe peut-être une antique malédiction liée à ce prénom abject. Cthulhu devait avoir une petite scène dans le film, dans sa demeure de R'lyeh la morte, tout au fond de la mer, et quand il a vu cette avalanche de Kevins au casting, il s'est fait porter pâle, en grommelant que N'est point mort celui qui éternellement dort, ou une connerie du genre.
N'empêche même que là, le critique de Télérama ne peut s'empêcher de remarquer en recopiant par dessus l'épaule du critique du Hollywood Reporter que « au bout d’un épisode et demi, vous n’avez plus qu’un souhait : que les deux familles s’alignent, l’une en face de l’autre, et appuient sur la détente. »
Avec une moyenne de 13,7 millions de téléspectateurs aux États-Unis, la minisérie fait néanmoins un carton d'audience chez les cyberploucs dans la catégorie fiction des chaînes du câble "soutenues par la publicité".
Jean Giraud meurt, rendant impossible l'intégration de la guerre Hatfield / McCoy dans la saga Blueberry. De toute façon, Morris et Goscinny s'en étaient inspirés pour " Les Rivaux de Painful Gulch ", une aventure de Lucky Luke. Jan Kounen se tâte pour mitonner une version psychédélique avec boutons de peyotl et champignons frais, mais la Gaumont dit non.
Les Quatre Barbus se reforment le temps d'un concert en première partie des Eagles of Death Metalau Bataclan. Leur prestation ne laisse personne indifférent, mais on a du mal à percevoir la filiation avec le groupe vocal formé en 1938 par Jacques Trisch, étudiant en lettres qui avait pour intention première d'animer les fêtes des camps de vacances dans un esprit très « Front populaire ».
Le comeback fracassant se transforme rapidement en concert d'adieux fracassés et définitifs au music-hall, et le gang des postiches est d'ailleurs dissous à peine minuit passé, sur ordre de la préfecture.
Aiguillé par un malandrin numérique des beaux quartiers, Warsen découvre la mini-série de Kevin Reynolds. Simultanément il dévore les mémoires de Jean-Pierre Dionnet, et comprend que se nourrissant lui-même de vieux papiers et de bobines argentiques démonétisées, il n'est qu'un avatar sous-programmatique du Maitre (bien qu'il cherche encore son Phil Manoeuvre) qui dans la rubrique "à toute berzingue" de Métal Hurlant alternait la présentation de faits avérés de façon fantaisiste et de calembredaines assénées avec le plus grand sérieux. Dans une crise mystique de magnitude 7 sur l'échelle de Richter qui en compte 3, Warsen se souvient avoir vu quand il était petit" Les Martin et les Blaise " et l'avoir même enregistré sur son magnétoscope Betamax de salon (19.5 kgs). Il comprend alors en un éclair son appétence pour les groupes vocaux masculins, affublés ou non de pulls marins.
2021 aussi
Après dix jours d’affrontements entre Israël et le groupe armé palestinien Hamas, les Ben Hatfield et les McCoyblum font croire à qui veut les entendre qu'ils ont tous les deux gagné. Ce n'est pas l'avis de Jean-Pierre Filiu, notre Juge de Paix envoyé spécial sur son blog, qui désigne d'autres vainqueurs et vaincus. C'est ça qui est bien sur les blogs google, c'est que pour l'instant, comme au Pop Club ou encore sur YouTube avec McFly McCron et Carlito, on peut y dire ce qu'on pense. Jusqu'au jour où on ne le pourra plus. De toute façon Jean-Pierre s'en fout, son blog est hébergé sur lemonde.fr, les mêmes qui éditent Télérama.
Au fond de l'océan, non loin du cimetière des Petites Sirènes, dans sa demeure de R'lyeh la morte, Cthulhu rêve et attend. Après une descente de 8000 mètres en apnée, Warsen trouve dans sa table de nuit une copie VHS non pilonnée de " Les Martin et les Blaise " en version française, devenue invisible depuis des lustres.
C'est cette version que nous diffusons ce soir dans la séquence du spectateur.
Sur l'infini territoire de chasse de nos ancêtres qu'est Internet, j'aime bien traquer les films un peu atypiques des Fils de Craô, dans l'espoir d'être surpris et diverti. "La raison du plus fou" est un film écrit par Raymond Devos et tourné par François Reichenbach en 1973. C'est une sorte de road movie à la française, tourné à la campagne par un cinéaste beaucoup plus à l'aise dans le documentaire que dans la fiction.
Ca se veut sans doute un dynamitage des rêgles du jeu social par la subversion poétique, en réalité c'est très très mou du genou, mais c'est l'occasion de voir Raymond Devos jeune, bien que son personnage soit aussi insupportable que dans ses one-man-shows vieux, enfin il n'a pas encore le ton geignard dont l'âge l'affligera, de revoir aussi Jean Carmet, Alice Sapritch, Paul Préboist, tous ces seconds couteaux sympathiques des années 70, ici en roue libre, ou disons menés par un scénario très très lâche. Monsieur Devos a mieux écrit son rôle que celui des autres. Il n'y peut rien, il est comme ça, on l'invite et il prend tout le lit. Sa corpulence existentielle est irréductible.
Si on veut savoir quoi en penser dans le monde d'après, il existe une critique correcte, à l'occasion de la sortie du BluRay.
Il y a une scène du film, avec Jean Carmet et Alice Sapritch, qui est immense. C'est cette scène que nous diffusons aujourd'hui dans la séquence du spectateur.
Que Dieu me préserve des clips licencieux faits main maison de Jorja Smith, en ce lundi de Pentecôte qui nous voit célèbrer l'effusion du Saint-Esprit le cinquantième jour à partir de Pâques sur un groupe de disciples de Jésus de Nazareth, dont les Douze Apôtres, mais pas les Quatre Barbus. Pour ceux que ça intéresse, cet épisode est relaté dans les Actes des Apôtres, et je tiens à leur disposition un assortiment de brochures pédagogiques sur la question.
Que Dieu m'en préserve, mais comme je sais qu'il n'est pas là pour ça, et que l'album de Jorja Smith est plébiscité dans Télérama (ancienne annexe du Vatican, du temps où chaque critique de film s'accompagnait de l'avis de l'Office Catholique), je m'en remets un petit coup pour la route.
Pour me mortifier, j'uploaderai à nouveau des vieux trucs sympas morts ayant existé jadis dans l'instant présent prochainement.
En tout cas elle a une jolie voix, Jorja Smith, et elle est plus facile à écouter sans les images.
Et pourquoi le volume 1 après le volume 2 ? Et pourquoi pas ?
Il est plus jazzy.
Il faut dire qu'Henri avait été accompagnateur de Django Reinhardt dans les années 30.
Nous sommes maintenant au début des années 50, les arrangements orchestraux évoquent irrésistiblement le jazz hot, les chansons de Boris Vian, les films avec Martine Carol, les téléphones en bakélite, Les cars de poulice Citroën H1 "le Panier à Salade" . La voix est langoureuse, les thèmes des chansons de Henri sont l'amour toujours, et sinon aussi l'amour toujours, parce qu'on ne s'en lasse pas, elles se veulent légères et inconséquentes. Il évoque aussi les paradis de l'enfance, et ses racines créoles. Un grand nombre d'entre elles m'étaient inconnues, et ce qu'il y a d'incroyable, c'est le côté "Docteur Jerry et Mister Love" de Salvador : il peut passer du french lover au nigaud dégénéré dans le même couplet; et ça, commercialement, je ne sais pas comment ça pouvait passer.
Fox-trot, mambo, cha-cha : on va salement se déboiter les fémurs à l'Ehpad.
Henri Salvador adorait faire l'andouille en photo (ici au studio Harcourt, 1946)