samedi 24 mars 2012

Les beaux livres de la vache qui lit : Ashe Barrett # 1



Tiens, puisqu'on en est à parler d'actualisation de potentiel, évoquons le cas Vincent Hardy.
Vincent Hardy ne finira sans doute jamais d'écrire la véritable histoire de Ashe Barrett.
Nous voilà donc éternels orphelins, on s'en doutait un peu, mais c'est l'occasion de se rappeler que le lien de l'attachement pend dans le vide.
C'est dommage, ça partait bien.
Vincent Hardy bénéficie de circonstances exténuantes, mais c'est pas une excuse.
Il vaut mieux faire envie que pitié, et à tout prendre, ne pas se préoccuper du regard des autres, à moins qu'on soit un tueur psychopathe dans le viseur d'un tireur d'élite du GIGN, mais il est alors bien tard pour refaire ses choix.
Les rares éléments biographiques collectés auprès de sources plus que douteuses ne permettent pas de reconstituer un parcours erratique, rendu d'autant plus malaisé que les vents karmiques soufflent assez fort à cette altitude où l'on tutoie les Géants de la Pensée Humaine.

Pour commencer, Vincent Hardy naît difficilement chez sa tante de Bujumbura, au Burundi, car sa mère avait dû s'absenter, prétextant des courses à faire, parce que ça mange beaucoup à cet âge-là.

Une des rares photos de Vincent Hardy bébé, entre son oncle et sa tante.

Plus tard, il est asséché émotionnellement sur le rivage de cette mère morte à marée basse, dont il apprend accidentellement qu'elle est décédée avant sa naissance, bien qu'elle ait tout fait pour lui cacher ce secret de famille.
Il est élevé à la force du poignet par un oncle incarné, rendu tétraplégique à la suite d'un bête saut dans une piscine vide, comme dans une célèbre chanson de Raoul Pitètre, oncle à qui il obéit dorénavrant au doigt, et surtout à l'oeil.



Quelques ouvrages écrits par son oncle, 
manifestement sous l'influence d'anti-inflammatoires périmés,
mais qu'est-ce que vous voulez, en Afrique on fait avec ce qu'on a, 
qui exerceront une forte influence sur le développement ultérieur de l'adolescent tourmenté.

Plus tard, il s'engage dans les commandos parachutistes, ce qui forgera sa personnalité de grand solitaire paranoïde, et donnera à son alter héros ce caractère décidé et risque-tout, surtout quand il s'agit de faire un choix erroné en situation d'urgence, don qui s'acquiert précocement et ne se perd que difficilement et presque par inadvertance, parce que même si on le laisse sur le siège à côté dans l'autobus 28 et qu'on fait mine de descendre à l'arrêt suivant, il se trouve toujours un Bon Samaritain pour vous faire remarquer que vous oubliez votre paquet, et tout est à refaire.
Plus tard encore on le retrouve inscrit à l’Institut Saint–Luc de Mons en section Arts Graphiques, et c'est difficile de comprendre pourquoi et comment, mais avec un coco comme ça vous imaginez bien que les contradictions inhérentes à l'être humain sont poussées dans leurs ultimes retranchements.
A la suite de quoi, et sans autre forme de procès, cette édition inédite dans le monde mondial, antérieure à l'album paru sous le titre "les 12 travaux d'Ashe Barrett" dans les années 8o chez Vents d'Ouest, est vendue à la main et sous le manteau sur le campus de Louvain-la-Neuve, ce qui n'est guère pratique, surtout quand la froidure condamne aux moufles pour éviter les engelures de poitrine, et on se l'arrache sans doute fort peu, vu sa teneur hermético-déroutante, pourtant indéniablement innovante et originale dans le domaine de la figuration narrative.
Encore plus tard  mais pas tout à fait le demain d'hier, une si belle aventure s'évanouit au milieu de nulle part comme le mirage d'un désert peut apparaitre au soiffard sur le plafond d'une oasis, alors que je ferais mieux de balayer la poutre que j'ai présentement empalée dans l'oeil de boeuf de ma porte.
L'Homme et Son Oeuvre inachevée retombent alors dans un oubli prématuré, et même Vincent Hardy a totalement perdu la mémoire de qui il était du temps d'Ashe Barrett, sauf s'il a revu entretemps le Angel Heart avec Mickey Rourke et que ça lui a provoqué une anamnèse (= amnésie de l'oubli), mais c'est statistiquement improbable.
Aujourd'hui, qui est enfin le demain d'hier et le hier de demain, il est illustrateur de livres pour enfants.

Voilà, vous savez tout ce que j'en sais, c'est à dire pas grand chose.
On peut redécouvrir avec une incrédulité croissante et une stupéfaction sur laquelle le temps n'a pas prise, l'enculé de sa race, le début de l'Oeuvre d'Ashe Barrett, sorte d'Homme Sans Qualités à la Robert Musil qui aurait fumé la moquette plus que de raison, et qui en subirait les conséquences dans un univers légèrement gauchi mais à forte présence policière, ce qui n'est pas plus paradoxal que le reste, tout en restant très attaché à sa crispation identitaire d'antihéros post-moderne rêvant d'aventure dans un monde où il est né un peu trop tard pour ça, bien qu'il soit doté d'une très riche vie intérieure, alors ça compense un peu.
http://bayfiles.com/file/4Y5t/NwG7f8/ashe_barrett_1.zip

http://bayfiles.com/file/5cnR/BEwPKY/AB2.zip

Qu'est-ce que j'oublie? ben de saluer dans l'allégresse et la dignité retrouvées là où on les avait laissées, la naissance de ce nouveau babylabel littéraire autoproduit, en souvenir des Editions Nallet-Boisrunvert, fruit d'une initiative privée de moyens mais dotée d'une mémoire de pachyderme et des clés du bureau pour pouvoir scanner sans nuire à la productivité de l'entreprise, alors que tant d'éditeurs indépendants et de libraires émérites ferment leurs portes après avoir mangé toute leur poussière.



8 commentaires:

  1. Ashe Barrett aurait été culte si Internet avait existé. Je ne sais pas s'il y aurait moyen de mettre ses BDs sur un site ? (les liens de l'article sont périmés maintenant)
    H Karrett (croisement de Ashe Barrett et Bruno Carrette)

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  2. Ben y'aurait moyen de faire comme je fais pour Goossens, de mettre toutes les pages en ligne dans l'article, mais t'imagines la taille de l'article ?
    Je vais y réfléchir.

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  3. C'est tout réfléchi.

    https://www.mediafire.com/?lpw0ypdlctf3opp

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  4. Il manque dans cette bio romancée toute l’œuvre préBarrettienne. On pourrait aussi parler du fan fou qui m’a insulté parce que je ne voulais pas publier sur mon blog les photos de sa reconstitution de la moto de Steve.

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    1. Alors si c'est éventuellement de moi dont tu parles, branlot (<--- là c'est fait !), je ne t'avais premièrement pas "insulté" (enfin... pas le souvenir de ça !), que deuxio c'était une réplique roulante de la Torbo (... et pas de la moto, donc !), et que tertio il est toujours triste de constater que lorsqu'on n'est que 3 fans de la même chose (ce qui devrait donc normalement nous réunir dans la joie et la bonne humeur !) à "échanger" sur le net, ça se termine invariablement en "pousse-toi de là que je m'y mette", "dégage" et "moi seul détient la vérité vraie" !... Confondant... voilà pourquoi je n'y suis jamais, sur ce net pourri !
      Mais pour ceusses qui voudrait en voir plus sur notre bô héros, rendez-vous sur https://www.facebook.com/AsheBarrett.is.alive/, le seul profil FB consacré à Ashe avec pleins de Goodies, dédicaces et trucs jamais vus ailleurs !...

      Go fuck, man... et que ta dépouille finisse momifiée au fin-fond de la berdouille !... ;-D

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  5. L'œuvre préBarrettienne est disséminée façon puzzle sur mon blog, hashtag takachercher.
    Je viens déjà de remettre en ligne dans le comm' précédent la version 1.0 noir et blanc du Ashe ronéotée et vendue à la main sous le manteau par l'auteur quand je l'avais visité à l'hiver 85, je vais pas non plus commencer à distribuer les plans de ma synagogue pour que des malandrins viennent me dérober les reliques du saint Mufti.

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    1. Ah, je n’ai pas le courage d’investiguer. Mais je fais confiance au mufti.

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  6. "T'as qu'à taper hardy dans le moteur de recherche du blog, comme j'ai fait sur le tien." dit le Mufti.
    C'était dur, hein ?

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