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jeudi 20 avril 2023

Georges Warsen - il faut savoir déraison garder [Invendus_&_Rogatons] (2023)





Les titres finalement écartés de l'ex-voto constituent le florilège (troisième et dernier)
du feuilleton désormais achevé, dans le champ du voisin, 
là où l'herbe parait bien plus verte, 
bien que les lois de la gravité et de la photosynthèse 
s'y appliquent sans différence notable.



jeudi 13 avril 2023

Georges Warsen - il faut savoir déraison garder [CD 1] (2023)


Un ex-voto est une offrande votive 
faite à un dieu en demande d'une grâce 
ou en remerciement d'une grâce obtenue 
à l'issue d'un vœu (votum) formulé en ce sens.
 
https://e.pcloud.link/publink/show?code=XZEpNSZrA26tqY1uFzoWEWe1HStr8rGOn0k

il s'agit ici du premier spin-off du feuilleton en cours, dans le champ du voisin, là où l'herbe parait bien plus verte, bien que les lois de la gravité et de la photosynthèse s'y appliquent sans différence notable.

(y'aura 3 épisodes, peut-être 4 si je lance une campagne de crowdfunding, mais je préfèrerais conclure rapidement mon petit tumulus littéraire et ne pas m'éterniser dans le No man's land où je me suis aventuré)
L'anthologie musicale peut se lire indépendamment de la série principale, qu'elle a partiellement inspirée.
Evidemment, tout est vrai, sinon ça ne serait pas drôle.
Ou alors, ça le sera, d'ici 2053.

jeudi 6 octobre 2022

Claude Nougaro - Récréation (1974)

Comme l'explique très bien ClashDoherty sur feu son blog, fermé en juin 2021 parce qu'il a eu le courage de reconnaitre que l'entretien de sa tribune en ligne lui avait fait perdre la raison et la maitrise de sa vie ("Vivre sans me casser le derche à essayer de maintenir ce blog, c'est une immense respiration pour moi, je ne me suis jamais senti aussi LIBRE que depuis que j'ai pris cette décision mûrement réfléchie"), les albums que Claude Nougaro sort dans les années 70 se vendaient beaucoup moins que ceux de Carlos Castaneda pendant la même période, et Récréation sans doute encore moins que les autres, puisqu'il est entièrement constitué de reprises (des décennies avant les audaces des disques entiers de covers d'Arno et de Florent Pagny) de chansons françaises souvent assez anciennes, qui font partie des préférées de Nougaro.
Les chansons elles-mêmes sont précédées de courts sonnets (qui valent mieux que les roupies de cent sonnets) à la gloire de chacun des auteurs d'origine, sonnets mis en musique par Jean-Claude Vannier, l'arrangeur dément de L'histoire de Melody Nelson, qui signe aussi quatre chansons sur l'album, et ça s'entend. 


J'ai découvert ce disque à l'adolescence, et en restai longtemps comme deux ronds de flan, hagard devant tant de modernité langagière et d'inventivité orchestrale. A côté de ça, le "No Fun" des Stooges repris par les Sex Pistols me sembla d'une insondable ringardise, surtout qu'il n'était pas encore sorti, mais surtout aussi après m'être enfilé "Pistol", la série biopic des Sex Pistols par Danny Boyle, et ses indispensables compléments, l'échevelé et tragique documentaire "The Filth & the Fury" et le sordidement pathétique "The Great Rock'n'roll Swindle" du même Julian Temple, qui donne envie de verser du plomb fondu dans les narines (et d'autres orifices si affinités) de Malcolm McLaren, et pourtant c'est pas très chrétien. 
Qu'ai-je renié mon humanité pour adorer de tels imprécateurs de carton-pâte, fabriqués par un vendeur de fringues ? Fallait-il que je sois en manque de repères. Quelle bande de tristes crétins, ivres de leur colère et de leur inconséquence (J. Rotten semble le moins stupide du lot, mais s'égare facilement dans des vertiges haineux, il faut dire qu'ils ont tous eu une enfance difficile, même si ça n'excuse pas tout, on comprend mieux leur besoin de revanche, et de vengeance de classe pour J. Rotten) Les chansons de l'album "Never mind the Bollocks" étaient très réussies, mais les personnes qui les ont créées étaient promises à l'échec et à la ténèbre, ontologiquement sinistrées au-delà de tout secours. C'est pourquoi je leur ai toujours préféré les Damned. Et qu'ai-je fait de leur rage soi-disant incandescente, à part m'abonner à Rock & Folk et me faire braquer par des dealers de mauvais shit, sur une petite route de campagne ? 
Rien de tel chez Claude Nougaro : drame passionnel avec menaces de mort par lapidation (les petits pavés) sexisme ordinaire (le scaphandrier), chansonnette égrillarde de harcèlement digne de comiques troupiers (Pouêt-Pouêt), agonie silencieuse d'un vieillard dans l'indifférence de sa bonne femme partie courir le guilledou et ramasser de la psilo (Bonhomme), pas de doute, on est bien en France; et musicalement : bossa-nova, jazzifications élégantes et discrètes, versions orchestrales savamment déstructurées, javas martiennes, un peu de tout, mais rien qui fasse suffoquer de dégoût et vous laisse pantelant de négativité comme les Pistols ont pu le faire.  
Je n'en dirai pas plus sans mon avocat, car presque cinquante ans après leur re-création, ces chansons respirent encore, Monsieur le Juge, et je n'en dirais pas autant de vous.

les infos :
les crédits de l'album :
le disque en paillettes à réhydrater dans une bonne bassine d'eau fraiche, comme les pifies :
Il y a deux ou trois inédits, parce que cette version de Récréation est issue d'une intégrale de Nougaro en 29 CD sortie en 2013 intitulée "l'Amour Sorcier".

jeudi 8 septembre 2022

Georges Warsen - J'aime les trains (2022)


Cher journal, 
cet été, j'ai parcouru la France en train. 
Une France craquelée par la sécheresse, une France incinérée par les incendies, une France quasiment à l'agonie (la climatisation du wagon était en panne entre Montauban et Bordeaux), mais le train est parti et arrivé à l'heure. Ça m'a émerveillé. 
Le train, en France, c'est un des derniers trucs qui marchent bien, avec les impôts et le wifi. J'ai donc réuni dans cette anthologie des chansons qui évoquent l'univers du rail, pour révéler le Règne, la Puissance et la Gloire de la SNCF dans les Siècles des Siècles. Et pourtant, "j'en ai raté, des trains, dans ma vie / le cul collé devant mon ordi / mais celui-ci, c'est le train du changement / je suis content de monter dedans
(Georges Warsen, "Niveaux de passage")  
Profitons-en, tant qu'y a du courant. 
Je consens 20% de remise aux cent premiers retraités de la SNCF et du dispatching qui m’envoient leurs dons spontanés sur leetchi, s'ils peuvent me présenter de l'autre main une carte vermeil et un pass sanitaire en règle.


jeudi 24 mars 2022

Jan Bang, Erik Honoré, David Sylvian, Sidsel Endresen, Arve Henriksen - Uncommon Deities (2012)

Comment échapper au chant d'amour
du Chicken of Depression
quand il est en rut ?
Quand ni Willem, ni Soulcié, ni même les dessins de Houellebecq dans Hara Kiri ne nous arrachent plus aucun rictus sangloté, quel onguent appliquer sur nos plaies ouvertes et nos jambes de bois ? Regarder des gens s'entretuer aux infos de l'ORTF, c'est encore pire que de regarder des jeunes forniquer pour des bons d'essence ou des tickets de pain sur les réseaux asociaux, car s'infliger des scènes insoutenables sans
 pouvoir interagir avec elles ni influer sur leur issue rend fou. C'est pourquoi depuis trois semaines, je ne regarde que des films de guerre. Ça me rappelle deux ou trois bricoles sur la nature humaine que j'avais dû perdre de vue, et pourtant j'ai lu le Bug humain de Sébastien Bohler, édifiant sur le sujet. Celui qui n'a pas vécu la guerre ignore tout des vertus de la prière, entendais-je début mars. Vertus que ne contestent ni l'église de Moscou ni celle de Kiev
Encore s'adressent-elles au même Dieu, celui des Orthodoxes. Mais comment le Dieu des Orthodoxes pourrait-il sanctifier cette boucherie - charcuterie ? 
hein ? 
A moins qu'il y en ait deux. 
Un par belligérant. 
Mais alors, comment ces Dieux peuvent-ils cohabiter dans le Cosmos, pas si infini que ça d'après le Grand Schtroumpf ? Et pourquoi le Dieu de l'Eglise de Kiev serait-il moins balèze au combat que celui de Moscou ? Ultimement, Lequel des Deux a la Plus Grosse Bistouquette Antichar ? Vastes questions, qui hantent les soldats des deux armées, et qui ont suscité une réponse originale chez David Sylvian, dans ce Uncommon Deities.

Marguerite Duras n'a pas écrit que des conneries,
elle en a aussi filmées (Desproges)
Car cela fait déjà trois décennies que, tel un déserteur de l'armée russe s'enfonçant dans les sous-bois en vouant Poutine aux gémonies après avoir dissimulé son char sous les branchages (comptez deux tonnes de fougères pour un char de taille adulte), David Sylvian progresse dans son intention de disparaitre complètement de nos radars, ne ménageant pas ses efforts pour sortir des albums de plus en plus confidentiels, n'hésitant pas à se confiner dans un silence explosif pendant des décennies entières passées dans les arbres, sans même que la caméra de Marguerite Duras puisse le surprendre à travers les feuillages, plutôt touffus en cette saison, qui est aussi la période optimale pour la nidification des déserteurs de l'armée russe. Ça en fait, du monde dans les arbres. Comme pour l'ouverture du Salon de l'Autosatisfaction, il y a foule.


Pour Uncommon Deities, David Sylvian a sans doute longuement médité le sketch des Monty Python "How not to be seen" dans sa cellule monastique. Parce que franchement, "plus arty que ce projet, tu meurs sur ma tombe, si tu te retrouves pas crucifié pour hérésie sur une porte de grange dans le bas-Berry". Mais même s'il s'est retiré du monde, qui a entendu une fois dans sa vie la voix profondément magnétique de David s'en rappelle à jamais et le cite de mémoire dès qu'elle s'échappe des frondaisons, même à la limite de l'audible et noyée dans des gazouillis électro-acoustiques. 

Son timbre est inimitable, et pour tout dire beaucoup moins oubliable que celui de Zemmour, par exemple, et c'est  le Pen perdue (qui sera pourtant au second tour, même si je louche sur les nichons à Mélenchon) pour s'effacer à tout jamais de nos mémoires, car je me souviens encore très bien par exemple de son album studio avec Robert Fripp (The First Day, très chouette) et du live mémorable qui s'ensuivit (Damage, très chouette aussi, dont les deux compères sortirent chacun leur propre version du mixage, tellement ils n'étaient pas fâchés).

l'affiche de l'expo : David Sylvian mimant
le chapeau de David Bowie, un must-have !
Alors qu'en ce moment, les programmes électoraux me glissent dessus comme un pet sur une toile cirée. Et pourtant, la Chine, l'Ukraine et le changement climatique se tirent la bourre pour faire avancer de quelques secondes avant minuit l'horloge de la fin du monde, donc ça serait sympa de trouver quelque chose d'intelligent à aller voter avant le Doomsday. Je peux faire mienne l'attitude de mon grand père : "peut-être que le parti se trompe, mais moi je me suis pas trompé de parti." La jouer conscience de classe en visite au Salon de l'Autocrate Islamo-Gauchiste. 
A moins que je me contente de prier, avec David Sylvian, quelques-unes de ces divinités infimes, peu connues et pas banales, comme Le Dieu de l'abdication progressiveLe Dieu des organismes monocellulaires, celui des Trous Noirs, celui du Silence (et dans Quel Oubli Tragique Il Croupit ! )


Sur un fin glacis musical de ses collègues expérimentateurs, David Sylvian interprète des poésies de Paal-Helge Haugen ayant pour objet des divinités subalternes et improbables, mais à la réflexion pas plus cons que les dieux mainstream (Jehovah, Mahomet, Russell Banks, Xi Jinping). Et tout cela a vraiment eu lieu, pas dans le Métavers, dans lequel on ne trouve déjà plus de terrain constructible, mais au sein d'une installation audiovisuelle conçue par David (dont on trouve encore des traces dans des lieux peu connus et mal éclairés d'internet), au cours du Punkt festival organisé chaque année à Kristiansand, en Norvège depuis 2005.

Un instantané du vernissage de l'expo. Ça fait pas rêver,
mais on était quand même mieux là qu'à Kiev.

Alors, réflexion post-moderne sur la perte de sens de nos sociétés trop libérales, ou énième tentative de Divid pour perdre son égo et décevoir son dernier fan, ce qui serait le signe d'un orgueil vraiment démesuré chez l'artiste déjà suspect d'une quête spirituelle qui a déjà bien plombé sa carrière depuis qu'il n'est plus un chanteur pop énorme au Japon ? Tenus par notre devoir de réserve, nous nous garderons bien d'épiloguer. C'est déjà pas mal que j'aie pu trouver les fichiers d'une oeuvre si confidentielle, alors que la moitié des serveurs russes sont en torche derrière le rideau de fer. Voici ce qu'en pensait un blog de micro-spécialistes, comme ça vous ne pourrez pas dire que vous n'étiez pas prévenus :

Ultra-rare : l'édition limitée et imprimée à la main
du guide des champignons toxiques et des poèmes
de Uncommon Deities passés par la bouche de David Sylvian

A cheval entre l'oeuvre radiophonique, la musique classique contemporaine et la musique improvisée, Uncommon Deities est une séduisante épopée moderne et envoûtante qui tente de tracer un arc entre les expériences collectives du controversé Manafon et les fulgurances expérimentales du chef d'oeuvre de David Sylvian, Blemish. Il résulte une œuvre blanche, un mariage délicieux avec le silence qui continue de tracer les contours d'une pop audacieuse et iconoclaste dont le label Samadhisound demeure la tête de pont.










Pour écouter le disque :

Pour aller plus loin et tout savoir sur les dieux pas connus :

- Les textes des poèmes sont cachés dans une base de données Soundcloud gérée par David depuis le Métavers, mais en général il suffit d'entrer le titre du texte dans un bon vieux moteur de recherche, comme j'ai fait ici avec le dieu des organismes monocellulaires :
ou celui des plus petits dieux
Le message est lumineux : si vous ne trouvez pas votre pointure, libre à vous de décrire puis de vénérer le dieu de la Facture Impayée, celui des Enculés Alcooliques, des Enfants Morts sous les Gravats ou du Déserteur caché dans les Branches.

Pour aller moins loin :
N'oubliez pas de visiter la chapelle du Dieu des enfants qui se laissent toucher (vu dans une petite église de Mayenne)

Pour aller nulle part : 
Continuez de respirer et de boire frais. Ça va passer. Tout est impermanent. 

jeudi 3 mars 2022

Vladimir P.'s House Music_Hidden Tracks (2022)

Chacun réagit à l'agression de l'Ukraine à la hauteur de ses moyens. Puisque L’OTAN va parachuter 200 000 promesses de soutien, pour ma part j'ajoute 3 titres à mon florilège Vladimir P.'s House Music
http://jesuisunetombe.blogspot.com/2022/02/vladimir-ps-house-music-2022.html


Après avoir envoyé hier une poignée de roubles à la Croix Rouge, malgré la modestie de mes revenus, ces titres se sont imposés à moi, et quasi-bousculés dans l'antichambre de ma conscience pour intégrer la compilation de soutien sortie samedi dernier.

- "Kalashnikov" par Goran Bregović, issu de la bande-son de Underground, le film de Kusturica qui relate le parcours de résistants clandestins enfermés dans une cave, depuis la Seconde Guerre mondiale jusqu'aux années 1990. A partir du destin croisé de deux amis, Marko et Blacky, depuis la résistance contre les nazis jusqu’aux milices serbes de Mladic en passant par les sommets de l’appareil d’Etat titiste, Underground trace une parabole sur l’histoire de la Yougoslavie de 1941 à 1991, un tourbillon allégorique qui sécrète de multiples questions, quelques réponses et beaucoup de confusion. 
Qu’est-ce que cela fait d’avoir grandi dans un pays qui n’existe plus ? Que faire de son encombrant fardeau de nostalgie ? Qu’est-ce que l’Histoire, comment s’écrit-elle, quels sont ses rapports avec l’idéologie ? Dans le couple Histoire/Idéologie, comment le cinéma et les images tiennent-ils la chandelle ? Comment les résistants d’hier se transforment-ils en salauds d’aujourd’hui et vice versa ?
https://www.lesinrocks.com/cinema/underground-2-99341-25-10-1995/
La polémique "Underground" avec l'indispensable BHL qui n'avait même pas vu le film avant de hurler "à l'assassin! "
http://www.kustu.com/w2/fr:polemique#le ... henri_levy
Toutes les musiques écrites par Goran Bregović pour les films de Kusturica sont magnifiques. On a surtout entendu celles de Arizona Dream, mais il faudra revenir sur les autres, ainsi que sur sa carrière post-cinéma.

- "Chérie c'est la guerre" par Sanseverino : on dirait qu'il vient de voir le Underground de Kusturica et qu'il en fait un palimpseste chanté :

c'était sur cet album, oui madame.
Des punks à chiens en limousine traversent la campagne de Serbie
De vieux dirigeants yougoslaves leur jettent des hosties
Ils ont le visage de Tito et le corps de Françoise Sagan
Mais ils ressemblent à s'y méprendre à Michel Blanc
Un vieil empereur en porte-jarretelles, la fiole de poppers à la main
Parle à sa cour des privilèges et leur dit "C'est pour demain !"
Et puis là, c'est la déferlante. Des vagues de haine xénophobe
Commencent à dévaster l'Europe et puis après, c'est tout le globe
Chérie, c'est la guerre !

C'est rare de voir Sanseverino partir sur une inspiration surréaliste, souvent ça tourne à vide, et je suis le premier à le déplorer. Là, il y a un petit côté Garcia Marquez, il faut en profiter, ça durera pas aussi longtemps que la guerre les impôts.

- "Alligators 427"  par Hubert-Félix Thiéfaine : les joyeux débuts du prophète auto-proclamé de l'Apocalypse Permanente et Inoxydable, qui ne fut jamais meilleur que dans cette funèbre et effroyable ritournelle propre à enterrer tous les effondrologues sous les gravats passés, présents et futurs. 

Ils arrivent, et je n'ai rien à me mettre.

Quelqu'un a prétendu sur Internet que Alligator 427 était le nom de code de l’armée américaine pour désigner les bombes nucléaires utilisées au Japon en 1945, mais je ne retrouve rien sur ce fait pseudo-historique, surtout depuis que Russia Today n'est plus accessible en ligne. Je pense qu'il a confondu avec "Arigato 427", qui était l'indicatif qu'il fallait composer sur les vieux téléphone à cadran dans la sous-préfecture de Kyoto pour joindre l'opératrice afin qu'elle vous passe le 22 à Asnières, et ce n'est pas très grave. En faisant des recherches sur cette chanson, j'apprends que c'est la terreur du cancer qui l'a inspirée à Hubert-Félix, cancer qui s'est révélé ensuite n'être qu'une carence en vitamines liée à la malnutrition, parce que le début de sa carrière fut peu nourrissant.
https://fr.wikipedia.org/wiki/Alligators_427

Heureusement que  « Les plus désespérés sont les chants les plus beaux. Et j’en sais d’immortels qui sont de purs sanglots », comme nous le disait Alfred de Musset en sortant du Palace, et Hubert Félix ne tarda pas à accéder au rang de Prince de l'Inquiétude et à succomber aux charmes d'une alimentation riche en protéines grâce au relatif succès de ses requiems pour flippés.



samedi 26 février 2022

Vladimir P.'s House Music (2022)




« Concernant ses valeurs fondamentales, jusqu’à quel point un individu préfère-t-il mourir plutôt que de faire des compromis et vivre ? Des millions de gens, à l’époque contemporaine, ont été confrontés à la décision de savoir si, pour sauver leur vie, ils seraient ou non disposés à trahir leurs amis ou leurs proches, à complaire à un dictateur, à vivre en esclavage ou à préférer l’exil. Les nations et les sociétés ont parfois à prendre collectivement des décisions similaires. Toutes ces décisions impliquent des paris sur l’avenir, faute de la certitude que la perpétuation de certaines valeurs conduise à l’échec ni leur préservation au succès. (..) Parmi les cinq petits pays d’Europe de l’Est confrontés à la puissance irrésistible des armées russes, les Estoniens, les Lettons et les Lituaniens ont renoncé à leur indépendance en 1939 sans combattre, alors que les Finlandais se sont battus en 1939-1940 et ont sauvegardé leur indépendance ; les Hongrois, eux, se sont battus en 1956 et ils ont été défaits. Qui d’entre nous peut dire quel pays a été plus sage et qui aurait pu prévoir à l’avance que seuls les Finlandais gagneraient leur pari ? »


 Jared Diamond. « Effondrement. Comment les sociétés décident de leur disparition ou de leur survie » (2005)

mardi 22 décembre 2020

[Compilation] La play-list du solstice (2020)

Hier c'était la journée la plus courte de l'année. 
J'ignore si vous l'avez senti passé, mais on était assez down dans le mix énergétique, même au niveau des premiers chakras. Moi-même j'ai à peine eu le temps d'effectuer quelques centaines de clics, que c'était déjà l'heure de retourner au lit. 
Je n'ai pas prémédité cette play-list, glanée ces dernières semaines de puits sans fond et de nuits sans lune, elle m'est apparue ce matin dans sa radicale altérité en me disant "poste-moi", un peu comme la VHS maudite dans le Videodrome de Cronenberg, je n'ai même pas eu le temps d'enfiler ma vieille robe de chambre, tellement ça pressait.
Si les jours commencent à rallonger, je vais pouvoir bricoler une version Extended Remix.

jeudi 5 novembre 2020

Peter Gabriel - Peter Gabriel IV "Security" (1982)

Prototype du masque de chaman FFP2
© Peter Gabriel 1982

En 1982, Peter Gabriel abandonne ses derniers oripeaux pop-rock et prog-rock pour créer de toutes pièces la pop ténébro-tribale, selon l'expression consacrée du site tripier consacré aux musiques qui n'ont pas la lumière à tous les étages gutsofdarkness, surprenant ainsi tous ses amis choisis par Montaigne et la Boétie. 
Une nuit où il avait oublié d'enlever son masque de chaman pour dormir, ce qui constitue peut-être une stratégie inconsciente d'l’effarouchement renforcé vis-à-vis de sa femme, qui sinon ne manquait pas une occasion de le taquiner au lit, il a vu en rêve Donald Trump triompher aux élections du futur, (rêve qui a aussi été envoyé à Stephen King qui en tirera Dead Zone), alors Peter décide de tout faire pour éviter ça; avec son armée des 12 singes, qui tapent comme des sourds sur leurs tambours, il compte bien l'arrêter avant que le grand anthropoïde accède à la présidence. Il faut choquer le singe, comme le suggère finement le titre phare de l'album. Car Peter n'est pas tombé de la dernière pluie, il a lu ce passage flippant dans le cours d'orthologique de Jacques Dartan :
"Tous, tant que nous sommes, avons en nous "quelque chose" qui veut toutes les femmes et tous les biens de ce monde : c'est la règle chez les primates, et elle repose sur des instincts qui s'éternisent chez les humains. Mais ce n'est grave et dangereux qu'autant que nous en sommes inconscients. C'est alors seulement que nous agissons en gorilles. C'est alors seulement qu'avec l'habileté infaillible qui marque du sceau de l'inconscient nos comportements ataviques, nous découvrons les moyens de parvenir à nos fins souterraines. Nous trouvons les astuces qui nous permettent de conserver et même d'appesantir notre autorité de singes sur ceux qui, en raison de notre mortelle ignorance des rudiments d'une biosociologie à peu près scientifique, sont restés sans défense contre des classes dirigeantes restées elles-mêmes à la merci de leurs instincts de primates."
Résultat des courses : le masque de chaman a beau orner la pochette du disque since 82 pour effrayer les moineaux et les infidèles, ça fait presque quarante ans qu'on s'époumone à brailler "Shock the Monkey", sans qu'on ait pu conjurer le maléfice : le Monkey siège toujours à la Maison Blanche, et n'a pas l'air décidé à s'en aller.
La seule bonne nouvelle, c'est que le disque n'a pas pris une ride.


vendredi 5 juin 2020

La ballade du déconfit né (2020)



A mi-chemin entre le n'importe naouak et le foutage de gueule, voici la nouvelle anthologie du cabinet des curiosités déconfinées.
Enivré par le succès de sa compilation précédente "Collapso is like collabo" (250 000 exemplaires déjà écoulés sur le marché, selon sa belle-soeur Marie-Louise Warsen, myopathe et dyscalculique), John sélectionne 32 morceaux qui ne lui avaient rien fait d'autre que du bien par où ça passe, et les aligne tels des endives endimanchées contre le mur de ses envies pressantes d'écouter des vieux machins assez zonés de nouveautés.
Grâce à sa nouvelle imprimante 3D achetée avec ses Assedic Spectacle maintenant qu'il n'a même plus envie de faire semblant de chercher du travail qui n'existe plus pour les jeunes CDD migrants de 57 ans qui ne peuvent plus rebondir dans la Réalité Réelle Ratée même avec un gros zélastique, il en extrude 50 000 ex du premier coup, juste pour voir venir, et il est salement impressionné par cette techno. 
Il commence à peine à les commercialiser devant le Super U en respectant les gestes barrière avant d'être appréhendé par les flics de la police, sous le fallacieux prétexte que la Sacem n'a rien touché alors qu'elle a tant de bouches inutiles à nourrir en ce moment, et que certaines des chansons gravées sur la galette sont franchement trop "déconfites nées", à l'instar du diamant noir, sinon vachement bronzé de l'anthologie que constitue par exemple la track #12 "Do you want my job", interprétée par Little Village, groupe qui fut jadis le prête-nom et le cache-sexe un peu trop voyant d'un talentueux joueur de slide-guitar qui avait signé la musique de Paris, Texas sous le pseudonyme de Rail Coudé et enregistré un nombre inquantifiable de disques superbes avec des musiciens cosmopolites comme Ali Farka Touré, Bill Frisell et MC Circulaire. 
Quand j'entendis pour la première fois résonner dans mon appentis le chorus cristallin de l'intro de "Do you want my job", ce fut un peu comme quand j'ouïs (sans l'avoir jamais ouï auparavant) "La Bombe humaine" de Téléphone, ce fut une expérience à la fois immanente et transcendante, sauf que là en plus Rail Coudé joue des notes si bleues qu'on jurerait entendre du gel tahiti douche obao fa tomber dans le lagon turquoise en faisant plic ploc, et que quand sa voix imitation créole mâchouillé commence à langourer, on se fait un film paradisiaque sur un atoll pas encore submergé par le réchauffement climatique et les méduses, mais quand on lit les paroles sur la e-pochette, attention à la dégringolade, car en fait le mec y dit : 
"l'air frais descend des montagnes, tandis que je me réveille et m'habille, dans le port le cargo m'attend, en provenance du pays du soleil levant, ils nous envoient leur vieux plutonium, on le décharge pour $2,40 par jour, est-ce que tu veux mon boulot ? je fais le truc, je prends l'argent, comme ça mes gosses pourront porter des Adidas, je me souviens de la douceur de l'air quand je ramenais le poisson à la maison, maintenant on achète la bouffe à l'épicerie parce que le poisson est tout pourri" 
question journée de merde au paradis de la Réalité Réelle Ratée, ce Rail Coudé en connait un rayon, c'est moi qui vous le dis. Un peu l'équivalent tropical-estival du "tube de l'hiver" du regretté Guy Bedos.



https://www.mediafire.com/file/wqm4j9ds5wfj48i/La_ballade_du_deconfit_ne.zip/file

Merci au capitaine Poignard pour sa blague sur Jean-Patraque.

samedi 11 avril 2020

Robert Mitchum : Collapso is like so (2020)

Le Ricatech PR85, seigneur invaincu
de la haute fidélité depuis plus de 50 ans.

Sur ma tombe, les préparatifs de la phase suivante de la pandémie vont bon train : on ravaude ses masques mortuaires au gros fil de pèche, on réaménage à la hâte l'abri anti-atomique Rustica® en crypte funéraire, et il faut penser aussi à emporter le radio-cassettes avec la compil qui va bien, des fois que le Doomsday soit reporté d'un jour ou deux.
Mon Ricatech PR85 ne m'a jamais lâché, mais il est aussi gourmand que moi question piles au lithium, par contre j'ai du mal à trouver des cassettes au ferrochrome, tout fout l'camp !
Au dernier moment, j'ai cherché un peu fébrilement à savoir si Yves Montand avait enregistré une cover de la complainte du Covid : "Dieu pardonne, moi pas", mais même en bootleg j'ai rien trouvé sur discogs.  Tantpistanmieux.
J'ai enchainé sans respirer 33 titres qui, à des degrés variés et pour des raisons plus ou moins évidentes, dont tout le monde se tamponnera avec soulagement, m'évoquent cette nouvelle ère dans laquelle nous sommes rentrés il y a bientôt un mois, et dont nous ne sortirons pas à Pâques, et pour la Trinité, la Trinité se tâte, mironton mirontaine, nous attendons l'allocution télévisée du boss de fin de partie.
Dans cette attente, de quoi cette somme acoustique est-elle le nom ? Anthologie de la chanson de crise sanitaire, pouvant servir à refonder une Effondrologie enfin délivrée de l'hydre de la finance internationale ? Compile palliative à passer à donf dans les Ehpads pour couvrir les protestations des résidents confinés ? Nouvelle pantalonnade pouêt-pouêt pour remercier les pompiers qui nous retirent des décombres calcinés de ces appartements mal ventilés dans lesquels nous avons voulu tester cette nouvelle génération de barbecues d'appartements qu'on a vu fleurir dans les grandes surfaces avec le retour des beaux jours ?  
Sans doute un peu de tout cela, laissons donc les archéologues de l'an 3000 faire leur boulot quand ça sera l'heure, contentons-nous des joies simples que nous offre l'instant présent de ce week-end pascal, à l'image du révérend Mitchum qui, lors d'une homélie restée célèbre dans les années 50 près de l'atoll de Bikini, recommandait de se cloitrer avec une belle-soeur, une caisse de skioui, une cartouche de chesterfield et la compile à Warsen.



https://www.mediafire.com/file/lxbuuy0697tupda/collapso_is_like_so...zip/file

dimanche 22 mars 2020

Confinés, le chant des partisans (Remasterisé) (2020)



Je vous préviens tout de suite que je ne m'y collerai pas, mais l'idée m'est tombé dessus depuis l'armoire, et à mon avis si l'un d'entre vous veut faire le malin sur youtube, je ne m'y opposerai pas, et en vérité il y a un coup à faire avec la chanson "Motivés" du collectif éponyme, le tube de l'été 1999 sur lequel on a tous emballé (à l'époque) la vendeuse de merguez à la fête de l'Humanité. 
Qui sert aujourd'hui du couscous jambon à la fête du Rassemblement National, mais c'est une autre histoire.
De toutes façons, ça tombe bien, aujourd'hui j'aurais pas su quoi voter au second tour.


Si quelqu'un veut s'y mettre, je dépose ici l'idée et le début des paroles,
sous licence Creative Commons Everybodys

[les nouvelles paroles sont entre crochets]

Le début, c'est facile :

Ami entends-tu le vol noir des corbeaux sur nos plaines

[Ami entends-tu le vol du Corona sur nos têtes]

Ami entends-tu les cris sourds du pays qu'on enchaîne

[Ami entends-tu les cris du sourds du Macron qui t'enferme]

Ohé, partisans ouvriers et paysans c'est l'alarme

[Ohé, commerçants, salariés et soignants c'est l'alarme]

Ce soir l'ennemi connaîtra le prix du sang et des larmes

[Ce soir l'hôpital paiera le prix du manque de masques]

Motivés, motivés

[Confinés, confinés]

Il faut rester motivés !

[Il faut rester confinés ! ]

Motivés, motivés

[Confinés, confinés]


Il faut se motiver!

[Il faut se confiner ! ]


Bon, je n'insiste pas, vous voyez le genre.
Si c'est ça le nouveau chant des partisans, alors c'est un peu comme dans "le camp du schmock", la chanson de Dédé et Mireille en vente dans cette salle, quand Mireille fait dire à son personnage "si j'étais partisan, je suis revenu réglisse".
A moins que ça soit Dédé.
En tout cas, prions pour que Francis Lalanne ne tombe pas sur mon brouillon.
Quelqu'un l'a vu récemment ? je crois que je vais passer chez lui resserrer son bâillon, en lui faisant croire que c'est un masque nouveau modèle.

jeudi 6 février 2020

Jean-Pierre Alarcen - Tableau N°1 (1979)

De loin, la nuit, par temps de brouillard, bourré sous acide (aujourd'hui on dirait plutôt binge-drinké aux benzodiazeps') on pourrait confondre la pochette du premier album de Jean-Pierre Alarcen avec celle d'un groupe de rock progressif grand-breton bien connu de tous les vioques du tiéquar, sauf de moi qui ai toujours fait un blocage. 
J'ai longtemps cotoyé les deux albums dans les bacs des soldeurs sans qu'ils ne m'évoquent quoi que ce soit de palpable, comme chantait Béranger dans Le Vieux.
Que voulez-vous, j'étais jeune, je conjuguais l'ignorance et la puissance, et je n'en savais rien. Chevauchant maintenant leurs antonymes, je vous assure que j'ai fière allure.


Jean-Pierre Alarcen est un guitariste que j'ai longtemps associé abusivement à François Béranger, puisqu'il a certes co-signé plusieurs de ses albums en tant qu'arrangeur, mais pas qu'eux. Alarcen fut aussi musicien "de session" (il me semble qu'on appelait ça avec mépris des "requins de studio", ce que confirme le wiki, mais c'était au temps où l'on pouvait vivre de son art, qu'on fasse de la musique, de la BD ou qu'on écrive des livres sans images). Vous trouverez tout ça sur le lien discogs plus bas, je vous fais confiance. Il a également enregistré à la fin des années 70 deux albums de rock progressif (rires) symphonique (toussotements gênés) luxueusement produits, on parle alors de Alarcen rupin. (les rires reprennent au bout d'un moment) et un autre "Tableau n°2" vingt ans plus tard, que je n'ai pas encore écouté.
Que vous dire ? ses deux premiers albums réunis en 1988 ont leurs moments surannés, mais aussi leurs bons moments. Je dirais que c'est de la musique comme on n'en fait plus, mais il faut se méfier, avec les jeunes de maintenant, ils sont capables de tout.
Ici sur votre gauche vous avez le Tableau n°1 en prévisualisation Youtube de votre achat sur mon site, je vous laisse trouver comment insérer votre CB dans l'écran, je ne suis pas sans contact, plutôt tactile  même comme garçon, c'est pour ça que plein d'aspects d'internet me désolent et me désincarnent, qu'elle était siliconée ma vallée.


pleins de liens pour faire redécouvrir Alarcen, bien qu'il ne soit pas encore mort à ma connaissance et à l'heure qu'il est (9h35) :

Alarcen est énorme au Japon.
l'incontournable wiki, que on en vient à se demander comment on faisait avant
https://fr.wikipedia.org/wiki/Jean-Pierre_Alarcen

une biographie autorisée avec des photos amusantes
http://pressibus.free.fr/zuzudisco/Alarcen/alarmain.htm

une discographie avec les crédits des musiciens
http://www.musikafrance.com/index.php/Jean-Pierre-Alarcen/Jean-Pierre-Alarcen.html

un article détaillé sur l'album de 1998
http://clairetobscur.fr/jean-pierre-alarcen-tableau-n/

l'avis d'un disquaire passionné
http://musicali.over-blog.com/article-jean-pierre-alarcen-88622370.html

l'avis d'un bloguiste enthousiaste
http://docoverblog.blogspot.com/2018/01/alternative-et-progressive.html

dans un univers parallèle, Alarcen part jouer avec Lavilliers (au lieu de Béranger) après le split de Montrose Sandrose
https://www.rockmadeinfrance.com/encyclo/sandrose/27928/

l'état des stocks chez discogs, le paradis du discomaniaque
https://www.discogs.com/artist/532430-Jean-Pierre-Alarcen

et finalement le fichier secret du téléchargement maudit


lundi 3 février 2020

Lovecraft Facts (8) : Adrian Belew

J'ai un vrai sourire
et ça transfigure ma disgrâce.
Non ?
Adrian Belew est un peu disgracieux. C'est un avis personnel. S'il aime la Nature, c'est avec Albert Jacquard, parce qu'ils ne sont pas rancuniers. Et ça ne s'arrange pas en vieillissant. Entendons-nous bien : l'auteur de ces lignes n'est pas sorti de la cuisse de Jupiter, mais ça ne nuit pas à sa vie professionnelle. Ou alors on m'aurait menti. En tout cas les gens se sont habitués, ou restent extrêmement discrets, et je n'en entends guère parler. Concernant Adrian, cette malédiction due à ses gênes est cruelle : il serait ingénieur informaticien, encore, ça passerait, mais ayant choisi la filière spectacle, c'est toujours un peu délicat pour lui de mettre sa tête sur les pochettes des disques (même si personne ne les achète plus) ou de s'exhiber en concert sans se mettre un sac poubelle 10 litres sur la tête, avec deux trous pour voir le manche de son outil de travail et un autre pour respirer. Et contrairement au personnage principal de Border, dont la laideur surnaturelle et préhumaine est due à des prothèses, lui ne peut se dessaisir le soir venu de sa hideur lovecraftienne en la mettant à tremper dans le verre à pied, et ses pieds dans le verre à dents. Elle est montée d'origine.
Si, j'ai regardé, hideur, ça existe bien dans le dictionnaire, même si personne ne l'emploie, pas même Lovecraft...ah si, tiens, Lovecraft, justement, dans Dagon : "Jamais je ne pourrai décrire telle que je la vis cette hideur innommable qui baignait dans le silence absolu d'une immensité nue. Il n'y a avait là rien à écouter, rien à voir, sauf un vaste territoire de vase. La peur que fit naître en moi ce paysage uniforme et muet m'oppressa tant que j'en eus la nausée." Il évoquait à mots couverts le visage d'Adrian, entr'aperçu dans un rêve lucide, ces songes au cours desquels la conscience onirique s'insurge du cauchemar qu'elle sait être en train de vivre et qui inspirent à l'innocent promeneur des sphères astrales, au sortir du sommeil, la rédaction de nouvelles d'épouvante un peu boursouflées, mais raisonnablement atroces.
Adrian essaye d'organiser une tournée en Chine
au profit des victimes du Coronavirus
mais ça ne prend pas longtemps avant qu'il soit reconnu.
Bien qu'il ait compensé sa relative laideur depuis tout petit en mettant au point une technique guitaristique hors pair et un phrasé tout à fait singulier, Adrian s'est quasiment fait virer pour mocheté de tous les groupes dans lesquels il a joué, les Talking Heads, Bowie, Frank Zappa (qui se pavanait pourtant volontiers sur les plateaux télé en se dépeignant sous les traits d'un progressiste refusant les diktats culturels en vigueur dans le monde du rock, comme par exemple les groupies, moi ça me parait admirable de pouvoir se refuser aux groupies, même si j'en ai fort peu et que ça serait donc virtuellement envisageable sans que ça soit ressenti comme un arrachement), King Crimson, au sein duquel il a pourtant cotisé trente ans, mais c'est vrai qu'ils faisaient des concours avec Robert Fripp pour savoir lequel avait le plus le charisme d'une moule et ça faisait fuir les trop rares clients, et finalement c'est Robert qui a gagné, et plus récemment Adrian s'est aussi fait lourder de Nine Inch Nails et de Porcupine Tree.
Si vous me croyez pas vous z'avez qu'à lire Internet, c'est écrit partout.
Et à chaque fois qu'il est remercié, il rentre chez sa mère, elle le console comme elle peut (les mères sont souvent balèzes en amour inconditionnel, c'est bien pratique quand on est un serial killer en fin de droits assedic ou un guitariste peu flatté par la nature) et il sort un album solo.
Un petit cercle d'initiés s'ébaubit alors "Rhhôôôhh bravo, Adrian, encore un beau crossover entre Mac Cartney et King Crimson", la presse spécialisée ronéotée  à un seul exemplaire sur le web s'en fait l'écho des savanes confidentielles, et l'artiste semble condamné à errer éternellement en quatorzième division blindée des Panzers de l'Echec Patent pour délit de sale gueule.
Ca fait déjà presque quarante ans que ça dure, et son dernier opus, Pop Sided, ne déroge pas à la règle, comme on dit dans le Landerneau des blogs musicaux : ni pire, ni vraiment meilleur que les précédents. Quoique Flux, un des plus récents, était vraiment pas mal. A condition de ne pas voir sa tête, évidemment, sinon ça fout tout par terre, dans ce monde où l'apparence compte plus que tout. Plus que d'avoir une belle guitare et de s'en servir, en tout cas.
Mais il existe une autre façon de voir les choses, si on sait les regarder avec l’œil du cœur : Adrian Belew, soi-disant parti de rien et arrivé nulle part, n'a finalement de merci à dire à personne. Il a joué dans beaucoup de groupes intéressants à des périodes où ceux-ci furent très créatifs, et en dehors de ça il a enregistré ce qu'il voulait comme il voulait, défrichant des champs expérimentaux dont aucun gratteux cyberculteur n'aurait osé retourner les grosses mottes avant lui; et en plus il a conçu des guitares, des applis mobiles et des racks d'effets.    
Et si ça se trouve, sa femme est ravissante.
Et il parvient tout à fait à vivre correctement de son art.
Lui.
Contrairement à moi et à Lovecraft.




picC'est en tombant sur une vidéo récente ci-dessus que je me disais à nouveau qu'il n'avait pas de bol, parce que j'avais trouvé le disque Side Four enregistré avec cette formule de Power Trio très énergique, alors que la vidéo est un peu foirée : l'image est d'une hideuse frugalité, le son caméra n'est même pas repiqué de la console de mixage. Peut-être qu'il cherche plus à être qu'à avoir, et qu'au fond il s'en fout, à partir du moment où il conserve la liberté de faire ou de ne pas faire ce qu'il lui plait plait plait quand ça lui chante chante chante.Donc ce n'est peut-être triste que dans ma tête, cette histoire.
Et pour le happy end, je lis sur le french wiki que Jerry Harrison renoue avec Adrian Belew et s'accompagne du groupe Turkuaz pour rejouer Remain In Light sur scène en 2020, à l'occasion des quarante ans de l'album.
Alors il est où, le problème ?

english wiki, rich as my tailor :

Belew by discogs
https://www.discogs.com/artist/55902-Adrian-Belew


[EDIT]

Flux volume 2 - notes de pochette
(collection privée)
En complétant de manière raisonnée ma collection de Belews, je tombe par hasard sur la pochette intérieure de Flux (Volume 2) d’Adrian, qui consiste en une déclaration d'intention.
Je peux faire la fine bouche sur sa capacité à me faire rêver, mais Adrian est un pont entre les Anciens et les Modernes, son commentaire sur « la musique qui n’est jamais jamais deux fois la même » est inspiré comme un fragment d’Héraclite.
Nous, nous pensions que la musique, c’était des fichiers, et nous les collections avec avidité, les jeunes de maintenant la vivent comme un flux et ne se prennent pas la tête avec.



Adrian a mis autant d’enthousiasme à créer son appli  que Peter Gabriel en avait eu à faire son CD-rom interactif Eve en 1997.
Même si au final, toute randomisée que soit l’appli « Flux », la démo me porte à croire que ce qui sort du logiciel de Belew ne peut sonner que comme du Belew, le Géo Trouvetout du rock.