L'autre jour j'ai voulu revoir les Anges déchus (Fallen Angels) de Wrong Car Wash, qui m'avait naguère tellement perturbé émotionnellement que j'en ai oublié l'avoir déjà revu la semaine dernière. Il faut dire qu'il règne dans ce film une grande confusion, et pas que sentimentale, du fait des lignes temporelles disruptives qui s'y frôlent sans s'y rencontrer vraiment, ou alors trop tard, quand la messe est dite, et que la destinée de ces êtres sans destinée est scellée, nous laissant finalement interdits devant un tel moment de poésie pure à base de méditation excentrique sur l’amour non partagé et l’aliénation dans un monde vertigineux de solitude, ce qui nous renvoie sans ménagement à notre adolescence sous-tendue par ces thèmes majeurs, et en sommes-nous jamais sortis, et vlan, prends ça dans les dents et passe-moi l'éponge, un monde où les mots se raréfieraient en altitude et ça serait pas du luxe, dans ce nouveau siècle au sein duquel Fallen Angels pourtant issu du précédent n'a rien perdu de son altérité.
Prions pour que Wong Kar Wai ne visionne jamais le Tenet ni le Memento de Nolan, ça lui donnerait des idées surnuméraires pour envoyer valdinguer dans tous les sens mais aussi à l'envers les règles de la narration non-linéaire.
Ce que je désagrée dans Tenet, en plus de tout le reste, c'est qu'il truande sur son identité à l'accueil pour s'inscrire dans la tradition ultra-codifiée et ô combien exigeante des récits de réversibilité du flux temporel, plus faciles à réussir en littérature qu'au cinéma.
Un film profondément troublant sur l'illisibilité de certaines polices de caractères verticalisées |
Alors que Fallen Angels creuse son propre sillon, indifférent aux modes qui l'ont précédé et qui lui succèderont dans les Siècles des Siècles. Mais ses personnages sont autrement émouvants. Car même le spectateur le plus endurci par les Biennales de Berlinades de films dard et décès ne tolère que jusqu'à un certain point qu'on moque sa perception du temps étriquée et psycho-rigide, qui lui fait préférer commencer un film par le début, le poursuivre par le milieu et le finir par la fin. Il faut que le jeu du chat avec la temporalité de la souris, comme la simultanéité simulée des actions rapprochées par la magie du montage alors qu'il n'en est rien, serve le propos du film.
Sinon, même avec du poil sous les ailes, les Anges déchus ne pourront s'élever bien haut dans l'azur cinématographique, et cette digression n'aura servi qu'à contourner par babord une affiche bien trop allongée.
à noter le satellite Spoutnik qui orne la pochette, comme une invite subliminable et anté-chronologique à courir nous faire injecter le vaccin russe et lire l'article éponyme sur ce blog concurrent, Spoutnik qui aurait été dessiné là comme par un hasard, 36 ans avant la pandémie, je n'insiste pas, mes lecteurs sont majeurs et déjà vaccinés, enfin j'espère pour eux. |
(= qu'on ne peut contredire ni récuser, et qu'il est malaisé de placer au scrabble).
"J'ai entendu la reprise de Only You dans la magnifique scène de fin de "Fallen Angels". La chanson est absolument transcendante dans ce contexte, mais en elle-même,
il s'agit simplement d'un arrangement un peu irritant d'une chanson pop très bien écrite. On ne peut pas parler d'album long, puisqu'il ne dure que 40 minutes, mais c'est quand même une purge de l'écouter de bout en bout, les reprises étant invariablement pires que les originaux. Les plus atroces sont les Talking Heads, Bruce Springsteen et Bob Dylan."
Je ne m'inscris pas en faux. L'album des piquettes volantes sent un peu le moisi. Et la moisissure est une forme de vie qui se sent ici chez elle, comme sur les autres blogs funéraires. On aurait presque envie de lui dire "Entre ici, moisissure, avec ton sinistre cortège"... si on n'avait pas déjà passé 3 mois sur la blague, sur un blog hyper secret dont je tairai le nom, par décence.
Contient le hit "Only YOU" !!!