jeudi 18 mai 2023

Lovecraft Facts (18) : Minimal Compact - Peel Session (1985)

Incantations dérobées dans un Necronomicon mal traduit en hébreu par un rabbin défroqué et lu de traviole, rageusement récitées sur un tapis musical plombé et malaisant, préfigurant ce qu'on n'appelait pas encore le rock industriel, imprécations blasphématoires éructées à la face de divinités malveillantes et infiniment pue-du-cul, émanations sonores méphitiques, endommageant durablement le corps astral : 

comme un air de bon chien-chien andalou
qui va donner la papatte
à son papa nihiliste stagiaire
(on est en 1984, ne l'oublions pas)
je hais bien content de retrouver les marécages mentaux hantés et radioactifs du Deadly Weapons de Minimal Compact, un groupe post-punk d'Israéliens échappés de Tel-Aviv et en goguette en Europe dans les années 80, comme Tuxedomoon avait fui San Francisco parce que, de l'aveu de Peter Principle recueilli de sa bouche aux lèvres purpurines quand j'étais branleur montpelliérain et qu'ils étaient venus jouer dans le coin, les gens y étaient trop feignants et trop défoncés.
Quelle joie de découvrir que Peter jouait de la basse et co-produisait l'album de Minimal Compact.



Je ne m'en suis jamais vraiment remis, comme de BlasphémaTorah, mais en pire. 
Si vous n'avez jamais incarné une joyeuse et intransigeante morbidité en vous ruinant le futur sur Deadly Weapons et en envisageant la dépression comme un des Beaux-Arts, je ne sais pas si vous avez raté quelque chose mais je suis impuissant à vous l'apporter, ne pouvant retourner en 1984, au sein de cet Eden pour Lugubres. 
Et pourtant c'est pas faute d'essayer. 
J'ai néanmoins déniché une Peel Session de 1985, qui voit nos sinistres lurons entonner leurs hideuses mélopées soutenues des échos orientalisants de bouzoukis nucléaires et de clameurs issues du chaudron des damnés, avec de subtiles variations dans les arrangements par rapport au disque, et franchement j'ai l'impression d'être de retour chez moi. Comme dans les cauchemars sous Tramadol, analgésique en vogue au Proche-Orient et très utile pour vivre sans espoir.



Malheureusement, le groupe ne s'est pas auto-suicidé après cette oeuvre maitresse, ils ont remixé et réarrangé à peu près toutes les décades leurs brûlots fétiches indépassables, se sont sporadiquement reformés et lentement propulsés dans un en-deça (l'envers de l'au-delà) de leur splendeur mortifère où ils n'apparaissent plus que comme une bande de petits vieux juifs et chauves, comme un pauvre couillon de goy qui tenta jadis de percer dans le milieu de la compilation cosmopolite, et dont l'insuccès fut à la hauteur de son manque d'ambition artistique, et après ça personne n'avait plus la force de lui jeter le moindre caillou pendant la 4ème intifada.

et des nouvelles de Minimal Compact qu'on aurait préféré ne pas avoir :

https://www.benzinemag.net/2019/11/23/minimal-compact-creation-is-perfect-ou-comment-depasser-le-piege-de-la-nostalgie/

5 commentaires:

  1. Le nom me dit bien quelque chose, j’ai dû entendre ça chez Lenoir et ça sonne bien mieux que ce que je craignais. Plutôt que de m’enthousiasmer pour un petit groupe rwandais qui sonne années 80, il me parait bien plus sain de ré(?) écouter ça.

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  2. je te le dis tout de suite, c'est une musique pour temps finissants.
    La bonne nouvelle, c'est qu'ils peuvent rester modernes pendant encore un moment. Pas moyen de remettre la main sur le CD. Mais je redécouvre le parcours du groupe dans la RRR.

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  3. pour mémoire, c'est le fonds de commerce de Louis Julien Poignard, travesti pour l'occasion en Marguerite Duraille : " pour la réalité réelle, ce qui fait son charme c'est justement qu'elle est ratée. insupportable prévisibilité de la réalité virtuelle, son ennui mortel tient à sa réussite."

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